L'annonce de la venue de Djamel Laroussi en Algérie n'a pas laissé indifférents les mélomanes. Preuve en est : les billets d'entrée se sont vendus comme des petits pains. « Dépenser 500 Da pour assister à un remarquable concert donné par un génie n'est rien », c'est du moins ce qu'on affirmé la majorité des gens rencontrés aux abords de la salle El Mougar. Une ambiance bon enfant régnait dès 19h30. Pour la masse humaine agglutinée devant la salle trop tôt, la prévoyance était de mise. Les portes s'ouvrent vers 20h45. Les plus pressés se dirigent directement vers la salle. Les autres prennent le temps de s'arrêter au niveau de la kheïma - dressée exceptionnellement à l'occasion du Ramadhan - pour siroter un thé et croquer des cacahuètes. Les minutes s'égrènent. Il est 21h30 et point de Djamel Laroussi sur scène. Le public s'impatiente. Des applaudissements et des sifflements retentissent. Un quart d'heure plus tard, les lumières s'éteignent. Une animatrice prend le micro pour souhaiter la bienvenue au public en arabe, en français... et en anglais. Cette dernière ne parviendra pas à lire la totalité de son texte. Elle est huée. Sa voix est étouffée par le mécontentement du public qui lui demande de rejoindre les coulisses pour laisser place à l'artiste. « On veut Djamel Laroussi. Tu nous fais prendre du temps avec ton discours stérile », lance le public à l'unisson. Des fous rires se font entendre ici et là. L'animatrice se retire discrètement avec un sourire au coin des lèvres. Alors que tous les regards étaient rivés sur la scène, des sons musicaux parvenaient du fond de la salle. Surprise générale : c'est Djamel Laroussi et ses quatre musiciens qui avancent en procession, tous vêtus d'une longue tunique. Djamel est au centre avec à la main un « tbel ». Ses comparses se plaisent à jouer du karkabou. Dans la pure tradition de « Baba Salem », ils entonnent Salem alikoum. Une fois sur scène, les artistes se débarrassent de leur tunique. Après avoir ajusté leur instrument, le la est donné pour interpréter Ahla Layali. D'une voix porteuse, Djamel Laroussi lance : « Bonne soirée, saha f'toukoum et saha ramadhanekoum. On va faire un voyage musical en chantant sous des airs gnawi. » Il sautille dans tous les sens, façon singulière de chauffer le public. Des salves d'applaudissements et des youyous nourris fusent. Des voix anonymes lui répondent : « Djamel président ! » L'ambiance est des plus électriques quand l'artiste reprend certains de ses tubes, à l'image de Mazel, Laâfou, N'kodo, El maâ, Alafou, Khadbeti aliya, ou encore Etoile filante. En véritable professionnel, Djamel improvise de belles ballades instrumentales, en l'occurrence avec la batterie et avec son gumbri, le tout rehaussé par de la dancefloor. A un certain moment, il demande aux convives de taper des mains et de reprendre avec lui certains morceaux. La complicité et la communion sont totales. Après deux heures bien pleines de spectacle, le leader du groupe remercie l'assistance d'être venue nombreuse. Les mines sont défaites et des regrets s'installent. Généreux et humble à la fois, Djamel décide d'enfiler sa guitare électrique pour rechanter en chœur avec son public Etoile filante, et Sidi Djillali était présent spirituellement pour séparer cette fois-ci le chanteur de ses fans. Vers minuit, les gens se sont dispersés en n'écartant pas l'idée de revoir leur idole sur scène pour la présentation de son nouvel album, prévu pour la fin de l'année.