Le rassemblement des familles de disparus devant avoir lieu, hier à Alger, a été empêché. Les participants à cette action pacifique ont été malmenés, bousculés et maltraités par de nombreux policiers dépêchés sur les lieux pour l'occasion. Des vieilles, dont l'âge dépasse les 70 ans ont été même embarquées et conduites au commissariat central. «Nous ne voulons que célébrer pacifiquement la Journée mondiale des disparitions forcées. Mais les autorités, fidèles à leurs habitudes, ne veulent plus d'une action pacifique. Les policiers nous ont brutalisés et malmenés. Des vieilles de 70 ans ont été embarquées et conduites au commissariat central», nous a déclaré Hassan Ferhati, représentant de SOS Disparus, rencontré au siège de l'association à Alger-Centre. Selon lui, au moins une dizaine de personnes ont été embarquées, dont Mme Boudjaâl, âgée de 73 ans. Elle n'a été libérée qu'au environ de 13h. «On a voulu me faire signer un PV, j'ai refusé. Ils (les policiers) m'ont demandé pourquoi nous voulons tenir ce rassemblement… Ils m'ont posé beaucoup de questions, dont celle de savoir quelle est l'association qui nous dirige», affirme-t-elle. Les témoignages des vieilles dames ayant subi la répression policière abondent dans le même sens. «Ils nous ont bousculés et insultés. Pourtant nous ne voulons que la vérité», dénonce Mme Boucharef Fatma Zohra. Chargit Djedjiga, une mère dont le fils a été enlevé en 1993, dénonce, elle aussi, l'attitude des autorités qui veulent en finir, à tout prix, avec le dossier des disparus. «Nous n'allons pas nous taire. Rendez-nous nos enfants et nous rentrons chez nous», lance-t-elle. Les familles de disparus ne sont pas prêtes à abandonner leur lutte pour la vérité et la justice. «Même s'il ne restera que deux vieilles, elles poursuivront le combat. Nous voulons connaître les tombes de nos enfants, sans plus. Nous n'allons pas poursuivre en justice ceux qui les ont kidnappés et tués», ajoutent encore les parents des personnes disparues. La répression des rassemblements des familles de disparus monte crescendo. Depuis le début du mois de Ramadhan, plus de trois rassemblements devant le siège de la CCNPPDH ont été empêchés. Le gouvernement considère que le dossier des disparus est «clos». Lors de son intervention, jeudi dernier au forum d'El Moudjahid, le président de la cellule d'assistance judiciaire pour l'application de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, Merouane Azzi, estime que le dossier est réglé. «6420 dossiers de disparus sur 6544 avaient été réglés», affirme ce responsable. «Des jugements de décès ont été prononcés pour les disparus dont les dossiers ont été traités et les familles indemnisées», dit-il. Les familles de disparus lui répondent. «Qui est ce monsieur Azzi qui ose parler au nom des familles de disparus ?», fulmine Hassan Ferhati. Profitant de cette journée, le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA) et SOS Disparus ont adressé une lettre à l'Organisation des Nations unies (ONU). Une lettre dans laquelle elles demandent notamment une intervention urgente du groupe de travail onusien sur les disparitions forcées afin que cessent toute pression des autorités algériennes pour obliger les familles de disparus à engager les démarches pour les indemnisations sans que la vérité sur le sort des disparus soit établie.