Le projet d'un groupe évangélique américain de brûler publiquement un exemplaire du Coran le 11 septembre a suscité hier de sévères mises en garde, notamment de l'Iran et du commandant des forces internationales en Afghanistan qui craint pour la vie des soldats américains. Le Dove World Outreach Center, groupe fondamentaliste chrétien basé en Floride, prévoit de brûler un exemplaire du Coran samedi à l'occasion du neuvième anniversaire des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Si ce projet était mis à exécution, cela servirait la propagande des talibans en Afghanistan et renforcerait le sentiment antiaméricain dans le monde musulman, a averti le général David Petraeus qui commande la Force de l'Otan (Isaf) et les troupes américaines en Afghanistan. «Je suis très inquiet des répercussions possibles, dans l'hypothèse où ils brûleraient un Coran», a-t-il déclaré dans un communiqué reçu à Kaboul. «Cela pourrait mettre en danger à la fois les troupes et l'effort global en Afghanistan.» Et d'ajouter : «C'est précisément le genre d'actions que les talibans utilisent et cela pourrait engendrer des problèmes significatifs. Pas seulement ici mais partout dans le monde où nous sommes présents aux côtés de la communauté musulmane.» De son côté, l'Iran a prévenu qu'une telle action déclencherait des réactions «incontrôlables». «Nous conseillons aux pays occidentaux d'empêcher l'exploitation de la liberté d'expression pour insulter les livres saints, sinon les sentiments que cela provoquerait dans les nations musulmanes ne pourraient être contrôlés», a affirmé le porte-parole des Affaires étrangères à Téhéran. En Indonésie, pays musulman le plus peuplé du monde, la minorité chrétienne craint aussi des «tensions». L'Union des 20 000 églises chrétiennes protestantes d'Indonésie a envoyé une lettre au président américain Barack Obama pour l'exhorter à intervenir. Brûler le Coran «nous ramènerait au Moyen-Age et constituerait un acte contre la civilisation», a expliqué son président Andreas Yewangoe. Croisade des évangéliques Une centaine de radicaux musulmans avaient déjà manifesté fin août devant l'ambassade des Etats-Unis à Jakarta et menacé de déclencher une guerre sainte si le Dove World Outreach Center persistait dans son projet. Ce groupe fondamentaliste chrétien, créé en 1986 et qui accuse l'islam, «religion diabolique», de chercher à dominer le monde, a invité à brûler des exemplaires du Coran samedi prochain devant ses portes à Gainesville (Floride). Il a aussi appelé d'autres centres religieux à en faire autant pour se souvenir des victimes des attentats du 11 septembre. Des associations musulmanes ont estimé que cette initiative confirmait l'augmentation de l'islamophobie aux Etats-Unis. Un projet de centre islamique près de Ground Zero à New York, site d'un des attentats du 11 septembre, déchaîne les passions depuis quelques semaines. Le maire de New York Michael Bloomberg soutient l'initiative et le président Obama a également apporté son appui au projet. Par le passé, des profanations présumées du Coran par des soldats américains, à la fois en Afghanistan et en Irak, ont attisé les tensions et provoqué violences. Le 13 janvier, l'armée afghane avait ouvert le feu sur une foule de villageois qui manifestaient dans le sud en accusant les forces de l'Otan d'avoir profané un Coran lors d'un raid. Sept hommes avaient été tués. Des enquêtes de l'Isaf et des autorités afghanes avaient par la suite démontré qu'aucun exemplaire du Coran n'avait été profané lors de l'attaque.