Après avoir brûlé les baigneurs, les mystérieuses méduses gluantes et urticantes, communément appelées «feux de la mer», «Low-yamala», «Morka» et «Broum», s'attaquent aux pêcheurs. «Les méduses apparaissent de juillet à octobre avec un pic fin août, début septembre», nous explique-t-on au niveau de la Chambre de la pêche. On nous signale également que les informations recueillies sur le terrain montrent qu'il y en a eu plus cette année qu'en 2009, mais moins qu'en 2008. Le patron de pêche Hammou Haddouchi dira: «Depuis près de cinquante ans, j'observe des échouages sur la côte une année sur deux ou trois. Ce n'est pas un phénomène nouveau. C'est très gênant pour nous de travailler en présence de la morka, car nos filets craquent sous son poids. Mais, à la fin, quand cette bête meurt et descend au fond, le poisson réapparaît en quantité considérable». De son côté, le raïs Abdellah Mahieddinne atteste avoir fait, avec son équipage, des observations de méduses qui s'étalaient sur des centaines de mètres où elles se tenaient entre elles, expliquant que ce sont celles de petites dimensions, en forme de soupe gluante, qui sont nocives à la pêche du fait de leur capacité à perturber la détection du poisson. Faisant un rapprochement avec les criquets pèlerins pour les dégâts causés, d'autres pêcheurs, contraints au chômage forcé, qualifient la situation de «catastrophe naturelle». «La prolifération de ces bestioles est évidente», déclarent-ils. «Les bateaux ne sortent pas en mer depuis plusieurs semaines. Le mois de Ramadhan, nous l'avons passé à quai. Surtout les sardiniers. Nous voyons souvent leur nombre augmenter. Cette année, le gros des méduses est resté au large. À plus de 50 brasses. Leurs arrivages font fuir la sardine, colmatent les filets et occasionnent une diminution des prises». Croissance accélérée Interrogé sur le sujet, M.Khaled Fliti, biologiste océanographe, directeur de la Chambre de pêche locale, dira que «de nombreux cas de pullulation sont survenus dans le passé mais, avec l'avènement des medias, maintenant, l'information circule plus vite et plus facilement. Mais si leur présence n'est pas, en soi, extraordinaire, la fréquence des apparitions susciterait, quant à elle, des interrogations», reconnaît-il. Ce responsable explique que les méduses comptent environ 4 000 espèces. Elles sont composées de 97% d'eau et de 3% de matière sèche. Elles sont sensibles à la lumière. Elles descendent au fond au cours de l'éclatant soleil de midi et remontent à la surface au petit matin, l'après-midi et le soir. Leur répartition dépend des vents et des courants. En Méditerranée, Pelagia nocticula peut atteindre 50cm de diamètre. En ce qui concerne les observations de cet été, il annonce: «La Pelagia, d'environ 10 cm de diamètre, semble avoir dominé. Caractérisée par 8 tentacules très extensibles, cette variété, phosphorescente et carnivore, est connue depuis très longtemps pour ses pullulations spectaculaires en Méditerranée. Sa durée de vie peut atteindre un an et la croissance de ses œufs et larves est accélérée par les eaux chaudes. Les grands adultes vivent en haute mer, mais les jeunes sont rencontrés près des côtes». Notre interlocuteur précise : «Une analyse scientifique a permis d'établir que cette espèce, appelée aussi, méduse mauve, dont les piqûres provoquent des brûlures, apparaît de manière cyclique tous les 12 ans». La réduction à l'échelle planétaire du nombre des prédateurs des méduses est alors avancée pour expliquer les mécanismes déclencheurs de la prolifération. Il s'agirait principalement des tortues marines, requins, thons, poissons-lunes, dauphins, crabes, anchois, étoiles de mer, maquereaux, espadons et anémones de mer.