Le président russe, Dmitri Medvedev, est attendu aujourd'hui à Alger pour une visite officielle d'une journée. C'est la première fois depuis son élection au pouvoir, en mars 2008, que le chef de l'Etat russe vient en Algérie. Depuis la chute du Mur de Berlin en 1989, la coopération entre l'Algérie et la Russie s'est progressivement désidéologisée et a laissé une grande place au langage du business. La visite effectuée à Alger par Vladimir Poutine durant l'année 2006 avait d'ailleurs contribué pour une large part à solder les comptes entre l'Algérie et l'ex-Union soviétique et poser les nouvelles règles de la coopération bilatérale. Preuve en est : Dmitri Medvedev gagnera la capitale algérienne à la tête d'une importante délégation d'hommes d'affaires qui comprend, entre autres, des représentants du géant gazier russe Gazprom et ceux de Vimpelcom, la firme qui vient de racheter 51% du capital d'OTH, et avec lesquels les responsables algériens discuteront probablement de l'avenir de Djezzy. En tout cas, il est difficile de mettre sur le compte du hasard l'annonce de la fusion entre Vimpelcom et des filiales d'OTH à la veille de la venue de Medvedev. Cela, surtout, sachant que le patron de Vimpelcom sera du voyage à Alger. Afin justement de préparer le terrain, le directeur général de Vimpelcom, Alexander Izosimov, s'est d'ailleurs empressé de déclarer hier que son groupe était «absolument ouvert à un accord avec le gouvernement algérien». Une attitude qui, faut-il le souligner, tranche avec l'intransigeance affichée par l'ancien propriétaire de Djezzy. Quoi qu'il en soit, le gouvernement algérien reste déterminé à acheter la totalité des actions de la filiale algérienne d'OTH. A l'instar des partenaires traditionnels de l'Algérie comme la France, l'Italie, les Etats-Unis, l'Allemagne, la Chine ou l'Angleterre, il est plus que sûr aussi que les entreprises russes espèrent être retenues pour réaliser une partie des projets inscrits au titre du plan quinquennal doté d'une enveloppe de 286 milliards de dollars lancé il y a quelques mois par le chef de l'Etat. De prime abord, les firmes russes partent avec un léger avantage par rapport aux autres pour la bonne est simple raison que le gouvernement souhaite vivement leur présence. Mais en cas de besoin, elles peuvent toujours compter sur Medvedev pour leur donner un coup de pouce. D'ailleurs, il est venu en partie pour les placer. Karim Djoudi : Les entreprises russes sont les bienvenues ! Le ministre des Finances, Karim Djoudi, les avait en effet invitées, le 30 juin dernier, à soumissionner aux projets prévoyant, entre autres, le développement des infrastructures et l'utilisation des ressources hydro-énergétiques. L'Algérie, avait-il souligné, est entièrement disponible «pour la mise en place d'un partenariat économique fondé sur l'encouragement mutuel des investissements ainsi que sur le transfert de savoir-faire et de technologie de la part des entreprises russes». La centaine d'hommes d'affaires (ils seront près de 120 en tout) qui accompagneront aujourd'hui le président Medvedev prouve à tout le moins que la déclaration de Karim Djoudi n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Et ils auront tout le loisir, sans aucun doute, d'exprimer tout l'intérêt qu'ils portent au marché algérien lors du forum d'affaires algéro-russe qui se tiendra parallèlement aux discussions qui réuniront Abdelaziz Bouteflika et Dmitri Medvedev. Il faut dire que contrairement aux sociétés chinoises ou françaises, les firmes russes n'ont que très peu profité des précédents plans de soutien à la croissance économique mis en place par le gouvernement. Si les Etats russe et algérien ont tenu à communiquer le moins possible sur cette visite, il n'est néanmoins pas faux de dire que celle-ci vient en quelque sorte tourner la page de l'«affaire des Mig défectueux» vendus par Moscou à l'ANP dans le cadre d'un contrat de vente d'armes signé en mars 2006. Une affaire qui avait refroidi pendant plusieurs mois les relations bilatérales entre les deux pays. Ce contrat, d'une valeur de plus de 7 milliards portait, rappelle-t-on, sur l'acquisition par l'Algérie de 28 chasseurs Su-30MKI (A), de 34 MiG-29SMT, de 16 avions-école Iak-130, de quatre systèmes de missiles sol-air S-300PMU-2, de 38 missiles sol-air Pantsyr et de 185 chars T-90C. Encore qu'il reste peut-être à savoir pourquoi les fabricants russes ont mis du retard pour livrer certaines commandes. L'occasion s'offre, en tout cas, aux deux pays de mettre tous leurs problèmes à plat. Bien évidemment, les échanges algéro-russes ne se limitent pas au seul secteur de l'armement. Cela, même s'il est de notoriété publique que Moscou est le fournisseur traditionnel de l'Algérie et que la situation ne risque pas de changer avant longtemps. La question du gaz et particulièrement de la stratégie de Gazprom en Algérie et en Méditerranée est sans aucun doute l'autre grand dossier qui occupera l'essentiel des discussions entre les deux responsables. Bien que l'agressivité affichée ces dernières années par les entreprises russes spécialisées dans les hydrocarbures sur le marché européen a très souvent inquiété les autorités algériennes – pour la simple raison que celui-ci (le marché européen) constitue depuis longtemps une débouchée naturelle pour la production de Sonatrach – il n'en demeure pas moins que l'Algérie et la Russie ont des intérêts communs à défendre sur le marché mondial du gaz. Des spécialistes dans le domaine de l'énergie s'attendent, à ce propos, à ce que la visite de Medvedev à Alger soit sanctionnée par un accord énergétique. Dans ce contexte, il est utile de rappeler que Moscou reste attaché son projet de constituer une OPEP du gaz. Il n'est pas impossible aussi de voir le président russe le remettre à nouveau sur la table, surtout qu'actuellement la conjoncture n'est pas du tout favorable pour le gaz.