Le Président effectuera demain une visite de travail à la wilaya de Ouargla où il supervisera personnellement l'inauguration de l'année universitaire 2010/2011 à l'université Kasdi Merbah. Comme à l'accoutumée, en pareille occasion, c'est le branle-bas de combat au chef-lieu de wilaya où ce genre de visite suscite de grands travaux d'embellissement et de décrassage. Il plait ainsi aux Ouarglis de constater qu'il est possible de recruter du personnel de nettoyage travaillant par brigade tôt le matin et tard le soir, non pas pour leurs beaux yeux mais pour redonner à la ville un visage présentable. Les prémices d'une visite présidentielle sont donc visibles et reconnus puisque le dernier grand ménage date, pour ceux qui s'en rappellent, de la campagne électorale pour la présidentielle de 2009 où le président Bouteflika avait fait un crochet par Ouargla sur son trajet vers El Oued. Les choses n'ont guère évolué depuis avec un exécutif léthargique et des assemblées élues converties en comités de marché. Seul changement : Nacer Maâskri vient de prendre ses fonctions à la tête de la wilaya de Ouargla, une wilaya malade de ses responsables, de ses élus et de ses faux notables, selon les chômeurs rejoints depuis peu par les universitaires demandeurs d'emploi. Ouargla reste sous haute tension depuis six ans. Les manifestations des jeunes chômeurs sont périodiques et prennent souvent la forme de sit-in ou grèves de la faim dont le summum a été la tentative de suicide collectif d'août dernier. D'autres manifestations ont été organisées durant tout l'été suite aux défaillances de Sonelgaz et de l'ADE après que celles de l'ONA aient été estompées par l'avancement de la pose du nouveau réseau d'assainissement. Pour le commun des Ouarglis, c'est autant un non-événement qu'un grand événement. Pour les uns, le circuit est rodé et tout tracé d'autant plus qu'il s'agit d'une circonstance nationale dont la symbolique est certes très forte mais qui concerne l'ensemble de la famille universitaire du pays. Pour les autres, le Président a compris que le poumon économique du pays réclamait un intérêt particulier et une visite officielle en cette rentrée sociale difficile et cela n'a qu'une seule signification : des décisions seront annoncées. Reste à savoir lesquelles. Mais que verra donc le Président en se rendant à Ouargla ? A l'université de Ouargla, le recteur se dit honoré par ce choix qui, selon lui, n'est pas fortuit. Pour M. Ahmed Bouterfaïa, l'université Kasdi Merbah a effectué un bond en un temps record atteignant des capacités d'accueil de 25 000 étudiants avec la réalisation d'un second pôle universitaire de 9000 places pédagogiques et une place plus grande pour la recherche scientifique dédiée aux thématiques de la région avec une ouverture sur le monde économique. Mais la famille universitaire est peut-être la seule à être aussi honorée et heureuse de la visite du Président car, faut-il le reconnaître, de toutes les réalisations effectuées ces dernières années, le supérieur est quasiment l'unique secteur à porter la marque d'un réel progrès. Qu'en est-il du reste et que pourra voir le Président à Ouargla ? A 24h de la visite, le programme officiel reste top secret mais on pourrait supposer le désarroi d'un nouveau wali qui vient d'hériter d'un cadeau empoisonné. Mais qu'à cela ne tienne, le projet du siècle, celui de la lutte contre la remontée des eaux dans la cuvette de Ouargla, imposé par le président Bouteflika en personne, est présentable bien que les effets positifs soient altérés par l'état général des lieux et la vision chaotique de la ville. La ville-dortoir d'El Khafdji, la nouvelle ville de Ouargla – où plus de 10 000 logements sociaux et sociaux locatifs ont désengorgé le vieux Ouargla – tout en créant un monstre urbain inadapté à la vie au Sahara : la clinique algéro-cubaine finalisée mais encore fermée …? Le commun des citoyens sondés, hier, espère que le président de la République verra tout ce que tout le monde s'ingénie à lui cacher et qu'il saura voir que Ouargla, qui dort sur les richesses du pays, mérite mieux que de souffrir à en mourir d'un mal chronique qui ronge ses entrailles et la pousse vers l'éclatement : une mauvaise gestion et une mauvaise représentation qui laissent perplexes quant à son avenir.