Un site exceptionnel est en proie de devenir une décharge à ciel ouvert. Les habitants du village n'ont eu de cesse d'interpeller les responsables pour délocaliser la décharge et rendre au site sa beauté. Takerkart, à l'instar de la plupart des villages kabyles, se dresse sur une colline merveilleuse au pied de la gigantesque chaîne de montagnes Taliwin, laquelle abrite le plus haut sommet de la wilaya de Sétif. Situé à 4 km au nord de la commune de Bouandas, ce petit village de quelque 500 habitants est connu pour être un vivier des meilleures qualités de figues et de noix, très convoitées par les commerçants de la région qui les revendent dans les grandes villes, notamment celles de l'Oranie. L'altitude, ses reliefs, ses forêts de chênes et de sapins, sa situation géostratégique, si proche de la Méditerranée qui se trouve à quelques dizaines de kilomètres à vol d'oiseau, subjuguent les visiteurs. Ces facteurs ont fait de Takerkart un centre touristique et sportif qui attire chaque année des centaines d'amateurs de la brise saine, sans oublier les sportifs, footballeurs et athlètes qui y trouvent tout le calme pour être zen, et un endroit idéal pour pratiquer leurs sports préférés. Sadek, un jeune plein d'amour pour son village, nous a dit à propos de ce terrain qui embrasse les hauteurs: «Le terrain a été aménagé durant les années 1980 pour abriter un centre de repos pour asthmatiques. Les travaux ont commencé, et il y a même une plateforme, mais le chantier est à l'arrêt. Ce terrain sert de lieu de détente aux jeunes des villages avoisinants.» Néanmoins, le village fait face à moult problèmes, il est devenu une décharge suspendue, en l'absence d'assainissement, et il a un perpétuel problème de gaz naturel. Le quotidien des villageois est fait de souffrances dues au manque de commodités. Vue d'en haut, la route qui mène à Taâzibt paraît sinueuse et difficile. Aâmi Tahar, moudjahid de la première heure, qui essaye de réhabiliter à l'aide d'une pelle et d'une pioche le peu qui reste de cette route complètement endommagée par les dernières intempéries, dit avec amertume : «On a tout donné pour l'Algérie, mais aujourd'hui nous sommes complètement abandonnés à notre triste sort. Cette route goudronnée datant des années 1980 devient impraticable dès l'hiver.» L'autre problème qui tracasse la population, est celui créé par la décharge qui surplombe le village, peut-être la plus haute en Algérie, puisque implantée au sommet de la féerique montagne de chênes zen, à 1 400m d'altitude, tout près du terrain cité auparavant, et à quelques dizaines de mètres d'une source qui alimente en eau potable le village de Ighladen. Et c'est à vous d'imaginer le danger que représentent les déchets chimiques sur la santé des citoyens, à court et à long terme. Sans oublier bien évidemment l'atteinte à la nature. Autre chose : les sachets s'accrochent aux arbres fruitiers de toute la région, ramenés les vents. Les populations de Chréha, le plus grand village de Bouandas et Takerkart, ont dénoncé à maintes reprises cette décharge, mais il n'y a eu que des promesses de délocalisation vers un autre endroit plus adéquat. Le réseau d'assainissement, très ancien, s'est dégradé, et les fuites y sont fréquentes. Pis encore, les maisons récemment construites ne sont pas encore alimentées en eau potable, d'où le recours aux forages. «On attend depuis longtemps l'arrivée du gaz naturel, mais il reste un rêve», déclare un villageois qui ramasse du bois sec.