Ceux qui ne visitent le grand cimetière de Ain El Beida que lors des tristes cérémonies d'enterrement d'un proche ou d'un parent décédé, ne peuvent percevoir, ni imaginer l'hallucinant décor de scène qui se déroule ici, quand le public des vivants est absent et que le cimetière résonne de l'étourdissant silence des Morts. Dés la fin de la dernière « Jânaza » et le départ du dernier cortège funéraire de la Journée, un curieux manège commercial se met aussitôt en place, de la porte d'entrée du cimetière jusqu'au carré des récentes sépultures. Des va-et-vient incessants, de très vives discutions, des appels stridents, des vociférations et même quelques éclats de voix en colère, aux limites de l'altercation, donnent la désagréable impression d'être dans un marché de véhicules d'occasion. On se rend compte aisément que cette agitation est bel et bien nourrie par la conquête du marché des pierres et du décor tombal. Installé depuis longtemps sur les lieux, tout prés de la porte d'entrée du cimetière, un opérateur privé, qui s'est investi dans ce créneau, ne cache pas sa colère face à ce qu'il qualifie de "désordre dans le respect des missions de chacun". Même si les règles et les procédures sont claires en matière de gestion des cimetières par les APC, il est vrai que « l'attribution » aux privés, des activités dites « de surface » a entraîné parfois quelques dérives dans les pratiques et les comportements des uns et des autres. Questionnés de leur côté, les travailleurs municipaux montrent du doigts quelques artisans privés qui, selon eux, empiéteraient dans les missions de la Commune en matière de réservation et de préparation des tombes. Du côté des artisans privés où la concurrence est visiblement plus forte, tous les moyens semblent permis pour « alpaguer » les clients. Entre les primes aux « rabatteurs », le prix des plaques de marbre et le coût de ce type de main-d'œuvre, rare et spécialisée, les artisans privés affirment qu'un bon chiffre d'affaires n'est pas facile à réaliser. Ce dernier, indiquent ses concurrents, se permettrait même d'étendre ses prestations au creusement et à la préparation interne des tombes. Il s'agirait surtout, semble-t-il, de ces cas d'inhumation d'un proche presque sur la même tombe d'un parent qui a été depuis bien longtemps enterré. Des cas rares et qui, selon un responsable communal, ne peuvent se faire sans autorisation officielle dûment accordée. Par ailleurs, questionnés à propos de « paiements illicites » réclamés par des fossoyeurs communaux pour une prestation censée être gratuite, les responsables de la gestion du cimetière communal apportent un démenti ferme et catégorique...