Un architecte de l'Epau m'a fait parvenir, il y a quelque temps, un texte me rappelant, autrefois, le sens des formes d'urbanisme des villes d'Algérie, dont la cité d'Ibn Mezghenna et son fahs (faubourg) inspiraient poètes et artistes peintres. Il s'interroge sur la disparition des vallons verts parsemés d'arbres, des collines tapissées de manteaux verdoyants, des lits d'oued enchanteurs et surtout de ces bâtisses à la toiture en pente couleur rouge-orange en osmose avec dame nature. Tout faisait corps, renchérit-il. Désormais, de ces paysages, il n'en reste que peu de choses dans nos villes, villages, bourgs et bourgades gagnés par un béton envahissant et bousculés par un désordre urbanistique. Plus nos cités urbaines n'ont de cesse d'être comblées par des cités dortoirs, des «volumes à loger» qui ont réussi à supplanter nos rêves, dit-il. Même le cordon du Sahel coincé entre la Mitidja et la côte littorale est en passe de devenir un fourre-tout. Une virée du côté de Baba Hassen, Dély Ibrahim, Birkhadem, Ouled Fayet, Souidania, Rahmania, Birtouta…, nous édifie, en effet, sur l'amer constat qu'offrent ces plaines dont l'air vicié a remplacé l'odeur du jasmin, de la fleur d'oranger et autres fragrances de champs qui n'ont plus droit de cité. Un paysage qui, au fil des ans, se voit enlaidi par des décharges anarchiques, des bâtisses érigées sans âme ni charme, des commerces qui débordent non sans engorger la voie publique, des chemins fangeux, des routes cahoteuses, des trottoirs inexistants comme à El Hamiz et Jolie-Vue, des lotissements qui donnent le haut-le-cœur... A croire que tout le monde se presse à conquérir un lopin de terre pour y installer à l'emporte-pièce sa demeure comme bon lui semble. Tout est urbanisable ! L'harmonie et le beau refusent d'intégrer les paysages environnants et l'alibi de planter dans des délais qui urgent des logements collectifs urbains ou suburbains est brandi par les politiques qui pressent nos architectes et urbanistes de faire dans l'œuvre expéditive. L'on a vu même des «quatre étages» élevés hideusement en pleine forêt. A dire vrai, la fièvre de bâtir accapare l'esprit «beggar» qui puise dans je ne sais quoi pour se permettre toutes les raisons à faire le pied de nez à un cadre bâti cohérent et bien pensé. Au diable le bon sens et place à l'esprit «rurbanisé», sommes-nous tenus de relever lorsqu'on est apostrophé par ce décor inintelligent et chargé de laideur. L'envie de voir de beaux logis harmonieux et conciliant «modernité à vivre et tradition à suivre», pour reprendre la réflexion de l'architecte Fayçal Ouaret, ne semble pas titiller les neurones de nos politiques qui tournent le dos à nos architectes, urbanistes, «bozaristes» et autres paysagistes.