Le décollage de la grande distribution a pris du retard. Activité très rentable et pourvoyeuse d'emplois, elle a aussi ses règles prudentielles qui font qu'il faudra attendre encore avant l'ouverture du premier hypermarché en Algérie Il faut bien se rendre à cette évidence : l'espace commercial algérien n'est pas encore tout à fait près pour l'hypermarché, vaisseau amiral de la grande distribution. C'est le point de vue des professionnels qui ont accompagné ces dernières années en Algérie la mise en route (systèmes informatiques, techniques marketing...) de la supérette première étage de la fusée " grande distribution ". Ce ne sont pourtant pas les effets d'annonce " officieux " qui ont manqué depuis le début des années 2000. L'arrivée des grandes enseignes Françaises (Carrefour, Auchan, etc.) évoquée plus d'une fois attendra encore. Sans doute au-delà de 2006. Tout le monde ne le déplore pas. Le petit commerce de détails, première vitrine de libération des importations dans les années 90 et protecteur du lien social dans les cités, gagne un délai de grâce. Les gens qui pensent que cela va être comme pour les kiosques multiservices qui ont très bien survécu au boom du téléphone mobile se trompent. Beaucoup d'hypermarchés et de supermarchés c'est nécessairement moins de chiffre d'affaires pour les commerçants de détail. Moins de commerçants à la longue. Là aussi les professionnels sont d'accord. Le stade actuel de développement des circuits de distribution en Algérie serait donc celui du passage de la supérette au supermarché c'est-à-dire en gros au retour au palier abandonné à la fin des années 80, le souk El Fellah. C'est d'ailleurs dans ce créneau du supermarché - plus grand qu'une supérette mais plus petit qu'un hypermarché - qu'a choisi de se lancer le groupe Blanky avec son enseigne Promy. Là aussi un décollage très longtemps retardé. problème d'aménagement A cause - selon Blanky négoce- de la difficulté à réhabiliter les anciens espaces de la distribution publique, rachetées en plusieurs endroits du pays. Dans la grande distribution comme pour les autres secteurs, l'activité a finalement plus été tirée par les nouveaux investissements privés que par les privatisations. Elle est, dans cette filière de l'aval commercial, fortement créatrice d'emplois, notamment sous qualifiés ; une aubaine face au chômage des jeunes, mais aussi souvent très rentable pour les premiers arrivés. Mais alors pourquoi donc tant de retard ? La scène se déroule à Ben Aknoun dans la ruelle de la mairie qui relie entre elles les deux grandes routes du quartier Des automobilistes bloqués dans la file depuis de longues minutes sont prêts d'en arriver aux mains. " C'était un peu comme cela avant déjà. Mais depuis que cette supérette a ouvert ici, c'est vraiment l'enfer tous les jours" raconte un client du cyber voisin. Si la grande distribution tarde encore à se développer en Algérie c'est dans une bonne mesure d'abord un problème d'aménagement. Tous les spécialistes le rappellent : le principe de tout acheter au même endroit est lié à un autre ; celui d'accéder avec sa voiture. Un bon supermarché c'est d'abord un bon parking. Passe encore pour cet espace de 300 m2, dominé par l'alimentaire, à la prétention toute locale. Il en est tout autrement pour les plus de 2000 m2, le seuil d'entrée de la grande surface. Faute de grands terrains disponibles dans le pourtour des grandes villes avec leur système d'accès autoroutier, le format qui se développe actuellement est celui du centre commercial urbain " vertical ". Le sort en demi teinte du centre des arts de Ryadh El Feth n'a pas découragé les promoteurs. Quatre nouveaux centres commerciaux de ce type devraient être inaugurés tout au long de la prochaine année dans la seule ville d'Alger, l'un d'entre eux celui du building en verre du pont de fusillés reprendra le principe de l'enseigne commerciale unique - probablement le français Ardy. Les autres, Chéraga et Sidi Yahia avec le même promoteur Sidar, ainsi que celui d'El Biar` mitoyen de la cour suprême, vont développer la location de franchise de grandes marques et surtout alignés donc des boutiques dans des espaces multi-fonctions ou restaurants et autres loisirs devront côtoyer les vitrines de luxe. C'est la touche " khaliji " de la grande distribution. L'hypermarché dans sa version européenne attendra. Il n'y'a pas qu'un problème de terrain indisponible à la source de ce contretemps ; la sécurité des approvisionnements et la transparence de leurs filières, les modes de facturation, le paiement électronique à la caisse, le parc du froid et des circuits de conservation, les délais d'enlèvement des marchandises des ports... les préalables requis pour le fonctionnement efficace d'un hypermarché ne sont pas encore là, même si pour quelque uns ils se mettent en place. Toutefois l'ouverture des plis qui doit se tenir ce mois de novembre pour l'attribution de la réalisation de la seconde rocade d'Alger dans les prochains 30 mois pourrait bien être - en libérant terrains et accès - le vrai coup d'envoi - dans l'Algérois - pour le modèle annoncé de la distribution grand format et grand espace. Alors vraiment il faudra trembler pour le petit épicier du coin.