L'Amérique a-t-elle un plan de règlement du conflit du Proche-Orient ? L'interrogation n'est pas nouvelle, mais elle revient avec insistance à chaque déclaration officielle ou voyage dans la région, les uns et les autres laissant au contraire dubitatifs. C'est le cas de la secrétaire d'Etat américaine qui s'est prononcée une nouvelle fois pour la création d'un Etat palestinien et s'est rendue une nouvelle fois dans la région du Proche-Orient. On ne compte plus les rencontres de ce genre, mais jusqu'à quand dira-t-on et pour quel bénéfice ? Très officiellement, Mme Condoleezza Rice a entamé dimanche une visite de 24 heures en Israël et en Cisjordanie, destinée à relancer le dialogue entre Israéliens et Palestiniens. La résolution du conflit israélo-palestinien « est l'une de nos priorités les plus importantes », a déclaré Mme Rice avant de quitter Djeddah (Arabie Saoudite) pour Tel Aviv. « Le Proche-Orient sera très certainement un meilleur endroit lorsqu'il y aura un Etat palestinien démocratique vivant en paix au côté d'Israël », a-t-elle ajouté. Mais qui en bloque l'émergence dira-t-on alors ? Certainement pas les Palestiniens, mais très sûrement les Israéliens qui ont fait de la crise institutionnelle, une stratégie de gestion de la crise du Proche-Orient (voir ci-dessous). Lors d'un forum israélo-américain, elle a appelé les Palestiniens à « démanteler les infrastructures terroristes », une allusion évidente aux organisations palestiniennes qui recourent à l'action armée pour faire cesser l'occupation israélienne. « Le démantèlement des infrastructures du terrorisme est essentiel pour la paix, car en dernière analyse, aucun gouvernement démocratique ne peut tolérer des partis armés avec un pied dans la politique et un pied dans le camp du terrorisme », a affirmé Mme Rice. « Si les Palestiniens combattent le terrorisme (...) tout en faisant avancer des réformes démocratiques et si Israël ne prend pas de mesure préjugeant d'un règlement final tout en agissant pour améliorer la vie quotidienne du peuple palestinien, la paix peut être un objet d'espoir et un objectif réaliste », a ajouté Mme Rice. Mais il n'est pas fait la moindre référence à l'essence même du conflit ou encore, aux récentes offres du mouvement Hamas en faveur de négociations avec Israël. Egalement présent au forum israélo-américain, le Premier ministre israélien Ariel Sharon s'est empressé d'affirmer que l'Autorité palestinienne s'est montrée « impuissante face aux organisations terroristes contrairement à ses engagements ». Et c'est le recours au chantage habituel. « La période qui vient va être critique pour l'Autorité palestinienne. Elle doit choisir entre le chemin de la paix et du dialogue ou le chemin du terrorisme extrémiste, qui permet l'existence d'organisations terroristes et leur participation au système politique avant qu'elles aient renoncé aux armes », a ajouté le Premier ministre. L'allusion est faite au mouvement Hamas qui s'est engagé dans la voie électorale où il apparaît bien placé. Ce n'est pas ce mouvement qui effraierait Israël, mais plutôt la certitude que les Palestiniens auront démontré leur aptitude à gérer eux-mêmes leurs propres affaires. Des élections législatives palestiniennes sont prévues le 25 janvier 2006. C'est dans ce contexte que Mme Rice devait s'entretenir hier avec M. Sharon, puis avec le président palestinien Mahmoud Abbas à Ramallah, en Cisjordanie. Avant l'arrivée de Mme Rice, le ministre des Affaires civiles palestinien, Mohammad Dahlane, a accusé Israël « d'étouffer » économiquement la bande de Ghaza en faisant traîner les négociations sur l'ouverture des frontières à l'issue d'une rencontre avec l'envoyé spécial du Quartette pour le Proche-Orient, James Wolfensohn. M. Wolfensohn a estimé, pour sa part, en allusion à la visite de Mme Rice, que les « prochaines 72 heures seraient critiques » pour l'avenir de sa propre mission. L'ancien président américain de la Banque mondiale est demeuré fidèle à sa réputation, c'est-à-dire se montrer réservé ou encore prudent. Comme en ce qui concerne, par ailleurs, la fameuse Feuille de route, ce plan international qui prévoyait la création d'un Etat palestinien avant la fin de cette année.