En réaction aux publications de WikiLeaks, le Vatican a mis en garde contre leur crédibilité La puissante machine diplomatique du Vatican vient d'être mise à nu à travers des câbles, dévoilés par WikiLeaks, qui font état de la forte influence du pouvoir papal sur le monde. Les différentes notes de la diplomatie américaine font état du «poids de la parole papale dans les pays traditionnellement catholiques» et soulignent que «le Vatican est l'une des rares entités souveraines à avoir une présence dans presque tous les pays du monde». La diplomatie américaine s'appuie souvent sur les informations recueillies auprès des congrégations religieuses réparties dans le monde, notamment en Chine. «Grâce à ses contacts avec l'église souterraine et l'église officielle de Chine, le Vatican a d'excellentes sources d'information sur les dissidents, les droits de l'homme, la liberté religieuse, le contrôle du gouvernement sur les populations.» Une influence qui trouve des passages même en Corée du Nord à travers «des organisations caritatives catholiques». Les diplomates américains rencontrent une religieuse, à son retour d'un voyage à Cuba, et l'interrogent sur la santé de Fidel Castro. Ils saluent par ailleurs la communauté de Sant' Egidio qui participe à des actions en faveur de la résolution des conflits et du dialogue entre les religions. «Ses membres peuvent être de bonnes sources d'information et de commentaires sur une variété de sujets et pas seulement ceux liés à l'Eglise», commente le câble diplomatique. En 2001, l'ambassade américaine avait demandé à maintes reprises à la communauté Sant' Egidio de s'engager dans les discussions autour du Kivu, une région de la République du Congo. De son côté, le Vatican demande des pressions supplémentaires américaines et britanniques pour obtenir le retrait des troupes ougandaises et rwandaises du Kivu. Au-delà d'être une source d'information, les diplomates du Vatican ont aussi une vision à faire passer auprès des Etats-Unis. Le cas de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne fait l'objet de beaucoup d'intérêt dans les câbles diplomatiques, souligne Le Monde. L'alignement du Vatican sur la position américaine favorable à cette entrée de la Turquie ne fait aucun doute. «Notre insistance à utiliser l'intégration et l'entrée dans l'UE comme une opportunité pour améliorer la vie des chrétiens en Turquie aura un écho au Vatican», rapporte Le Monde en citant un câble diplomatique. Toutefois, les Américains sont déçus par l'opposition du Vatican à l'invasion de l'Irak. L'ambassadeur américain auprès du Saint-Siège affirme : «Nous continuons à faire pression pour que le Vatican publie des commentaires constructifs sur l'Irak.» Le Vatican avait été sollicité en 2002 pour plaider auprès de Yasser Arafat la fin de la seconde Intifadha. Aujourd'hui, les Américains regrettent que le Saint-Siège «ne profite pas davantage de ses «bonnes relations avec l'Iran» et «ne les ait pas utilisées dans le cadre des discussions sur la situation politique au Liban ou sur le dossier nucléaire iranien». Si le Vatican avait exhorté les Américains à conserver des liens avec la Syrie et l'Iran, les Américains ont demandé au pape de ne pas recevoir M. Ahmadinedjad. Ce fut chose faite, puisque le pape a renoncé à rencontrer tout chef d'Etat. L'influence papale a aidé à la libération de 15 marins britanniques détenus en Iran, en mars 2007. «Des restes de sentiments antisémites au Vatican» Une note écrite en 2009 par Juileta Noyes (n°2 de la mission diplomatique américaine au Vatican) souligne que le Vatican «est resté publiquement silencieux sur la réélection de Mahmoud Ahmadinedjad et sur la crise pour préserver sa capacité à agir comme intermédiaire si une crise internationale apparaissait». En matière de lutte contre le terrorisme, les Etats-Unis tablent sur un soutien futur du Vatican. «Les services de sécurité du Vatican ont demandé au FBI de les aider à monter des formations pour faire face aux potentielles menaces terroristes. Pour les Etats-Unis, c'est une manière d'améliorer le dialogue avec le Vatican sur le contre-terrorisme.» L'influence du Vatican est aussi sollicitée pour soutenir les positions américaines en matière de climat. Les Etats-Unis ont pu avoir son appui pour convaincre «discrètement» des Etats à signer l'accord final de la Conférence de Copenhague en janvier 2010. Selon le New York Times, un câble diplomatique américain de 2002 indique que «malgré de réels progrès» dans les relations du Vatican avec la communauté juive sous le règne du pape Jean-Paul II, certains dans la hiérarchie catholique «manifestent des restes de sentiments antisémites». Le document cite «un responsable âgé d'origine française» qui se plaint en disant : «La forte attention (du gouvernement américain) pour l'antisémitisme moderne européen découle de l'influence excessive des juifs dans nos médias et notre gouvernement.» D'autres responsables du Vatican sont également cités dans le télégramme comme ayant déclaré que certaines poursuites judiciaires contre l'Eglise «étaient l'œuvre de juges juifs ayant trop d'influence» aux Etats-Unis. En réaction aux publications de WikiLeaks, le Vatican a mis en garde contre leur crédibilité : «Le Vatican se refuse d'entrer dans l'appréciation de l'extrême gravité de la publication d'une grande quantité de documents réservés et confidentiels et de ses possibles conséquences. Naturellement, de tels rapports reflètent les perceptions et les opinions de ceux qui les ont écrits et ne peuvent être considérés ni comme l'expression du Saint-Siège ni comme des citations précises des paroles de ses responsables.»