Amel Bachiri est une jeune journaliste, poète et romancière algérienne établie aux Emirats arabes unis depuis douze ans. Elle vient de publier aux éditons El Beyt à Alger, Fitnatou Al mâa (La séduction de l'eau). Une histoire qui ressemble à une légende, celle de deux frères, dont l'un tue froidement l'autre. De retour de «l'exil», l'assassin élimine son frère pour posséder sa maison. Amel Bachiri est auteure de plusieurs romans et recueils de poèmes. - Fitnatou Al mâa est un roman court qui porte un titre curieux. Ce n'est pas l'eau qui vous inspire autant, non ? Mon texte est puisé dans le réalisme magique. Il se développe dans des ambiances imaginaires. L'histoire se déroule dans un espace pastoral où l'eau devient un trésor. Une eau rare. Je me suis inspirée de la légende. Là où le rêve se concrétise. Mais en fait, tout est lié : la magie, le rêve, les aspirations personnelles, la répression. La trame est également inscrite dans un contexte historique particulier avec l'arrivée des Portugais dans la région du Golfe. Cela dit, j'ai évité d'écrire un roman idéologique en mettant en avant le personnage du héros. - Le réalisme magique est surtout d'essence sud-américaine, Gabriel Garcia Marquez, Carlos Fuentes… Parfaitement. Je suis un peu influencée, car je lis la littérature sud-américaine dans sa langue d'origine, l'espagnol. J'ai visité plusieurs pays de la région comme la Colombie et Cuba. Fitnatou Al mâa a été déjà publié à Amman, en Jordanie, aux éditions Ammoun. J'ai écrit six romans. Mon premier roman, Safarou al khataya (Voyage des péchés) a été édité au Caire en 2004. L'histoire est inspirée par ce qu'a vécu l'Algérie durant la décennie noire. A Alger, j'ai publié aux éditions Dar Al Hikma, Al Alamou layssa bekheir (Le monde ne va pas bien), un roman qui plonge dans l'univers des prostituées. Akhirou al kalam (Les dernières paroles) est un roman que je considère comme un complément du roman de Gabriel Garcia Marquez Memoria de mis putas tristes (Mémoire de mes putains tristes) - Un complément ou une suite à cette nouvelle ? En fait, j'ai repris les deux héros du roman de Marquez et je leur ai créé un nouvel univers dans lequel ils vont évoluer. Akhirou al kalam a été édité au Caire. L'Institut des études orientales de Grenade vient de publier ce roman en Espagne après sa traduction. Le roman sera également publié en Argentine. J'ai aussi écrit Latousadik ma youqal (Ne crois pas ce qui se dit), publié au Caire, et qui raconte l'histoire d'un journaliste qui vit loin de son pays natal. Actuellement, je finalise un autre roman. - Lequel ? Akbarou mina samaa (Plus vaste que le ciel) qui sera bientôt publié en Egypte aussi. J'ai beaucoup travaillé sur ce texte. Le roman est pour moi une expérience d'écriture, notamment sur la narration. J'ai voulu mettre à profit mes différents voyages et «exploiter» sur le plan romanesque un personnage qui a existé dans le réel. Il s'agit de Havana, un artiste peintre qui se met à la recherche de Picasso. Il ne retrouvera pas Picasso mais se transformera en matador. - Le roman algérien a-t-il évolué et où en est-il aujourd'hui ? J'ai beaucoup de réserves sur le roman algérien, qu'il soit écrit en arabe ou en français. Je parle de l'idée du roman et de la construction romanesque. Il y a beaucoup d'idéologie dans le roman algérien. Il est toujours mis dans des cadres géographiques. Aujourd'hui, les romanciers cherchent à s'adresser à l'univers. Je ne veux pas citer de noms d'auteurs mais les techniques narratives des romanciers algériens sont trop figées, basées sur la description. Dans le monde arabe, il n'existe pas de roman dominant. Le roman saoudien semble évoluer. Ce n'est ni bon ni mauvais. Il s'agit d'un roman naissant qui peut avoir un marché vaste. Bien sûr, la géostratégie de la création n'est pas loin. Globalement, je suis optimiste sur l'avenir du roman arabe. Il existe une génération composée de Yéménites, d'Egyptiens et de Maghrébins qui promettent.