Agissant dans l'intérêt de la santé publique en Algérie et au nom de la corporation que je représente dans la région ouest, j'attire votre attention sur la diffusion d'une émission que votre station consacre à la médecine par le biais d'une animatrice tous les matins». C'est par ces propos que le président du conseil régional de l'ordre des médecins a tenu, par le biais d'une lettre, à alerter le directeur de «Radio Tiaret». De quoi s'agit-il ? Selon docteur Abdelkader Hemaidia «Diffusée à une heure de grande écoute et destinée au large public, cette émission consacre la médecine parallèle, teintée de charlatanisme par rapport aux progrès que l'humanité et la médecine ont connus ce siècle dernier». En écoutant les prescriptions thérapeutiques non prouvées scientifiquement et édictées par l'animatrice aux gens qui la sollicitent, on reste sidéré. «Prescriptions thérapeutiques qui doivent obéir à certaines règles dont la compétence du prescripteur validée par un diplôme de médecine, de phytothérapie ou d'homéopathie et l'engagement de la responsabilité personnelle du prescripteur quant aux conseils donnés». «Toute substance proposée pour soigner comporte des indications, des effets secondaires et des contre-indications que ledit prescripteur est supposé connaître», ajoute notre interlocuteur qui dit ne pas comprendre le pourquoi d'une telle situation à l'heure où, au-delà des insuffisances, des efforts louables ont été entrepris par l'Etat pour la prise en charge de beaucoup de pathologies. «Je constate, ajoute-t-il, que des citoyens fascinés par ces prescriptions miraculeuses ont délaissé leur traitement médical pour se retrouver dans un état de santé déplorable». Un exemple parmi d'autres illustre le propos. Une dame hypertendue, qui utilisait du gingembre comme traitement unique, a fini, malheureusement, sous dialyse. Nous ajoutons à ce triste tableau l'affaire tout récente d'une jeune personne victime d'un charlatan qui se prétendit «Raki». Après lui avoir soustrait 30 millions de centimes pour l'achat d'herbes médicinales et autres ingrédients, le patient a fini par rendre l'âme et l'affaire a valu le mandat de dépôt au «Raki» et le contrôle judiciaire pour le marchand. Parmi les pièces à conviction présentées devant la justice, figure une planche sur laquelle est gravée la croix de David. Adeptes des solutions de facilité et friands du miraculeux, l'ignorance aidant, certains citoyens délaissent les programmes nationaux élaborés sur des bases scientifiques modernes : vaccinations, dépistage du cancer du sein ou du col de l'utérus chez la femme, traitement du diabète ou de la tuberculose, pour se retrouver dans un état de santé critique et à un stade avancé. «Vous n'êtes d'ailleurs pas sans ignorer qu'en médecine, le facteur temps est vital», tentent d'avertir des médecins qui ont joint leurs paroles au président pour stigmatiser ce genre de pratiques de la médecine parallèle que radio Tiaret tente d'asseoir. C'est pour toutes ces raisons et d'autres que le directeur «est prié de bloquer cette émission», peut-être instiguée par son animatrice de bonne foi mais qui peut s'avérer dangereuse quand elle s'écarte des chemins éclairés de la science. Ne dit-on pas d'ailleurs que «l'enfer est pavé de bonnes intentions» ?