Les membres de la famille Amine occupaient en tant que locataires le rez-de-chaussée d'une villa depuis 1962 au niveau du 5, rue Mohamed Alilat, dans la commune de Kouba, avec une quittance de loyer où était mentionnée la résidence de cette famille. Une des familles occupant au même titre l'autre partie de l'habitation a procédé à l'achat de la totalité de l'immeuble, sans en informer les voisins. Une bataille juridique entre les deux parties a été alors déclenchée. En juillet 2009, la famille Amine est expulsée, et se trouve depuis sans domicile fixe, n'ayant pas bénéficié d'un logement social malgré les demandes formulées depuis 1987 auprès de l'APC de Kouba. Quelque 400 familles expulsées par voie de justice et qui vivent la même instabilité ont été recensées à Alger. Le calvaire est le même pour cette veuve de la commune de Dar El Beïda rencontrée au siège de la Ligue algérienne de la défense des droits de l'homme (LADDH). Elle raconte : «Nous avons été sommés de quitter notre appartement acheté, il y a quelques années, avec acte notarié. Notre surprise et notre désarroi étaient indescriptibles lorsque la décision de justice nous a été notifiée. Le premier propriétaire a finalement vendu la même maison à quelqu'un d'autre et a pris la fuite. Notre adversaire a eu gain de cause». Cette dame est venue en fait trouver de l'aide et des conseils auprès du comité SOS familles expulsées. Cette femme habitant à Dar El Beïda doit faire valoir le fait qu'elle a acheté son logement, et que le premier propriétaire n'est qu'un «escroc». Pas facile, reconnaît-elle, en ayant du mal à retenir ses larmes. Parmi les cas d'expulsion recensés, figurent également des habitants de logements de fonction. C'est la situation vécue par sept familles habitant dans des logements de fonction appartenant au centre spécialisé de rééducation de Birkhadem. Elles ont été expulsés en juin dernier suite à une décision de justice, «mais aucune autre solution de rechange ne nous a été offerte». Le ministère de la Solidarité nationale avait pourtant promis de reloger ces familles, mais aucune suite n'a été donnée à cet engagement. Les membres d'une famille expulsée, faut-il le rappeler, perdent de facto leurs droits liés à la résidence. C'est ainsi qu'ils sont dans l'impossibilité de renouveler leurs documents d'identité. Toute demande de renouvellement de la carte nationale d'identité, du passeport et du permis de conduire doit être accompagnée d'un certificat de résidence qui ne peut être délivré qu'après la présentation des documents justifiant le lieu d'habitation. Une procédure qui pénalise ces expulsés qui se voient, après expiration de leurs papiers d'identité, délogés et sans papiers. Plusieurs dispositions de la loi concernant l'application des décisions d'expulsion sont violées. Des familles sont jetées dans la rue en plein hiver. C'est le cas de plusieurs familles de la cité des Jasmins (El Madania) expulsées le 22 décembre dernier. Parmi elles, celle de Menad, habitant ce quartier depuis 1963. Selon Me Benbraham, il y a violation claire de l'usage concernant la trêve hivernale. Cet usage est signé par le ministère de la Justice et en vigueur dans tous les pays du monde.Les familles qui font objet d'une décision d'expulsion ne peuvent pas, selon ce que stipule cet usage, être mises dehors durant l'hiver, ou au mois de Ramadhan, ou encore durant la période des examens scolaires des enfants.