L'Algérie vient une nouvelle fois d'être ébranlée dans les fausses certitudes de ses dirigeants. Avec l'acte de piraterie ayant visé le bateau le Blida battant pavillon algérien en mer d'Oman, que reste-t-il de cette conviction chevillée au corps de nos responsables selon laquelle nous n'avions que des amis en Afrique et dans le monde arabe ? Au point de croire qu'un acte d'hostilité à l'égard de l'Algérie était tout bonnement impensable dans cette sphère géographique à laquelle nous appartenons. On pensait naïvement que la politique arabe et africaine de notre pays, qui constitue un axe stratégique de notre politique étrangère, pouvait nous mettre à l'abri de certains fléaux qui font l'actualité internationale, dont celui de la piraterie en haute mer qui se moque de la politique et des discours lénifiants sur la fraternité arabe chantée à tous les modes et à tous les temps. Ce mythe-là aura vécu. Ce qui devait arriver arriva. De la même manière, avec une sérénité toute aussi déconcertante, on avait asséné que le phénomène du terrorisme était étranger à nos valeurs et ne pouvait pas, par conséquent, nous toucher avant que le pays ne sombre corps et âme dans le chaos. On avait juré aussi que le sida, c'était pour les autres, pas pour les pays vertueux que nous sommes censés être de par notre statut de pays musulman. Que la crise économique et financière mondiale qui a ébranlé la planète n'aurait aucun effet sur l'Algérie. Le réveil à la réalité est toujours aussi brutal, comme vient de le rappeler l'épisode de ce premier acte de piraterie enregistré dans l'histoire contemporaine de l'Algérie. L'Algérie a-t-elle fait une mauvaise évaluation du risque encouru en empruntant ces routes maritimes de sinistre réputation sans prendre les précautions requises, quand d'autres navires étrangers se font escorter par leur marine nationale de guerre lorsqu'ils s'aventurent dans ces zones de tous les dangers ? Maintenant que le mal est fait, tout en espérant un dénouement heureux de cette tragique affaire et que les enseignements appropriés soient tirés pour l'avenir, la question qui taraude les esprits, c'est de savoir comment l'Algérie va-t-elle gérer cette affaire. Notre pays, qui a œuvré activement au niveau des instances internationales en vue de l'adoption d'une résolution criminalisant le paiement des rançons aux terroristes de tout poil, se voit ainsi rapidement rattraper par l'actualité. L'action diplomatique algérienne qui s'est aussitôt mise en branle pour suivre l'évolution du dossier pourrait-elle s'avérer payante et suffisante pour tirer le bateau algérien et son équipage des filets des pirates ? Ou bien alors, l'Algérie acceptera-t-elle de payer les «droits de passage» dans l'hypothèse, haute, où les pirates venaient à exiger une rançon au paiement de laquelle les armateurs des nombreux bateaux de toutes nationalités capturés dans cette zone furent tous contraints et forcés de se résigner pour sauver leurs navires et équipages même si, officiellement, les politiques jurent à qui ne veut pas les entendre qu'ils n'ont pas cédé et qu'ils ne céderont jamais au diktat des pirates ? D'une certaine manière, avec l'arraisonnement du navire algérien, c'est la diplomatie algérienne qui est mise à l'épreuve (prise en otage ?) des nouvelles lois internationales à l'élaboration desquelles elle a activement contribué.