Nos banques publiques sont loin d'être contrôlées. Ce constat d'échec, qui, certes, n'est pas un fait nouveau, en témoigne le nombre important de cas de détournements et de transferts de fonds enregistrés ces dernières années, devient assez inquiétant lorsqu'il émane de l'autorité monétaire elle-même dont l'une de ses principales missions est justement d'exercer un contrôle régulier et rigoureux sur l'ensemble des banques et les établissements financiers de la place. Lors de son passage à l'APN la semaine dernière pour présenter l'évolution de la politique économique et monétaire nationale, le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, a reconnu solennellement devant les parlementaires les limites de l'institution qu'il dirige dans l'accomplissement de sa mission de contrôle et de supervision bancaires. Les défaillances des banques publiques en matière d'organisation et d'information rendent compliquée, avoue le gouverneur, leur supervision « tant sur pièces que sur place » et « nécessitent la mobilisation d'équipes renforcées d'inspecteurs de la Banque d'Algérie ». Un aveu d'impuissance qui a laissé perplexe plusieurs députés de l'hémicycle, eux qui attendaient du gouverneur non pas de reconnaître les limites du contrôle, mais plutôt de connaître les mesures prises par la BA pour freiner un tant soit peu l'hémorragie financière dont sont victimes nos banques publiques. Le contrôle des banques, si l'on se fie aux propos du gouverneur, butte sur un problème d'effectifs. pas assez d'inspecteurs La Banque d'Algérie n'aurait pas ainsi assez d'inspecteurs pour mener les opérations de contrôle. Mais aucun élément n'a été apporté par M. Laksaci pour expliquer cet état de fait et comment en est-on arrivé à cette situation ? L'inefficacité du contrôle interne des banques transparaît clairement dans le rapport présenté par le gouverneur. En effet, le contrôle sur pièces réalisé en 2004 par les quelques inspecteurs de la Banque d'Algérie relève que quelque 407 lettres, dont celles relatives aux demandes d'explications et d'informations, ont été adressées aux banques en 2004 contre 296 lettres en 2003. Ces correspondances ont concerné notamment les retards dans la transmission des reportings, le non-respect des normes prudentielles, les différentes anomalies et les demandes d'informations complémentaires. Plusieurs dossiers ont été transmis à la commission bancaire pour suite à donner, notamment en ce qui concerne les déclarations de risques. Le rapport de la BA fait également observer que certaines banques étaient plus ou moins en déphasage avec la réglementation bancaire et accumulaient les déficiences en matière de trésorerie, de respect des normes prudentielles réglementaires, de démarrage de leurs activités, de maîtrise de leur management et du contrôle interne et de publication des comptes annuels. S'agissant du contrôle sur place, sont concernés, selon le gouverneur, le contrôle intégral de six banques, le contrôle des opérations de commerce extérieur pour 9 banques, l'évaluation du portefeuille de cinq banques publiques et des enquêtes spéciales de quatre autres banques. Les résultats de ces opérations font ressortir des insuffisances dans les procédures d'octroi des crédits et dans la maîtrise de gestion de ces crédits, fait savoir M. Laksaci. En conséquence, a-t-il ajouté, les provisions complémentaires évaluées par les inspecteurs de la Banque d'Algérie sont souvent importantes et ont un impact sur les résultats des banques concernées. Ce qui débouche, a-t-il ajouté, sur des besoins de recapitalisation. Quant au contrôle a posteriori des opérations de commerce extérieur par la Banque d'Algérie, 31 575 dossiers de domiciliations sont été contrôlés en 2004 contre 34 396 dossiers en 2003. Les résultats de ces vérifications ont donné lieu à l'établissement de 51 procès-verbaux (PV) de constatation d'infraction correspondant à 9178 dossiers de domiciliation irréguliers, en 2004, contre 42 PV correspondant à 3497 dossiers de domiciliation irréguliers en 2003. Le gouverneur de la Banque d'Algérie a, sur ce fait, émis des inquiétudes du fait que les banques et établissements financiers n'ont pas à ce jour mis en place l'ensemble du dispositif de contrôle interne. Ce qui constitue, a-t-il dit, un « risque opérationnel majeur et contrarie la qualité des résultats du contrôle externe ».