Douk-douk, Little cook, Speed lock, Solinger, Opinal-Fine, Balzer et autres noms sont quelques marques des couteaux et canifs en circulation actuellement en Algérie. Cela sans parler des sabres, poignards et machettes. Les pays de fabrication sont la France, Allemagne, Chine et d'autres qui font dans la contrefaçon, d'après ce qui est gravé comme inscription sur la lame de ces objets. « Bien acérées ou mal aiguisées, longues ou petites, ces lames constituent une menace de mort certaine pour les citoyens », nous précise un officier de la police scientifique de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN). D'ailleurs, tout le monde en parle avec un grand constat d'impuissance : des citoyens de tous âges, notamment jeunes, se baladent avec une arme blanche dans la poche. Du coup, c'est le réflexe général de faire de même. Pour cela, la réponse est toute trouvée : se prémunir et se défendre contre toute attaque avec ce genre d'arme. Mais, d'où viennent ces objets qui semblent anodins ? La prolifération de ces armes a gagné du terrain, puisque on les retrouve sur les étalages des marchés publics. Par exemple, au niveau du marché de Boumati (à l'est d'Alger), des vendeurs à même le sol proposent des poignards appelés « Rambo » et d'autres modèles de forme courbe. « C'est comme ceux portés au Yémen », nous confie un vendeur. Comment les a-t-il eus ? « C'est une affaire de cabas et c'est un commerce comme les autres. Pourquoi, y a un problème yakhou (oh mon frère sur un ton viril) ? Il en est de même pour certaines rues commerçantes des quartiers de Bab El Oued, Belouizdad ou El Harrach. Il y a aussi une partie de la réponse à rechercher du côté des vitrines de certains fonds de commerce, éparpillés à travers toutes les localités du pays. Des canifs, couteaux et cutters y sont exposés comme les autres articles ordinaires proposés à la vente. Ils deviennent assimilables à n'importe quel autre produit commercial. Or, ils sont à la portée de n'importe quel acheteur. Le choix ne manque pas et différents prix sont proposés. A partir de 40 DA, on peut acquérir un canif à la lame bien tranchante. A Alger, quelques boutiques sont connues pour être, depuis des années, spécialisées dans la vente de ce genre de produits. EIles sont destinées plutôt aux pêcheurs et aux chasseurs, comme c'est le cas de celles se trouvant à la rue Hassiba Ben Bouali ou la rue Asselah Hocine. Les gérants de ces boutiques affirment ne pas vendre aux mineurs ce type de produits. « On essaye de faire comprendre gentiment à un jeune qui nous paraît louche que c'est destiné à nos clients pêcheurs ou chasseurs. » Il est bien entendu difficile d'évaluer, même d'une manière approximative, les quantités d'armes blanches actuellement en circulation en Algérie, avouent les services de sécurité. Cette situation renseigne sur les faiblesses des instruments de contrôle actuels, notamment aux frontières du territoire national. Mais une chose est certaine : les drames et les pertes en vie humaine, entraînées par l'usage de ce type d'armes, sont très importants, nous confirment certains officiers rencontrés. Selon la direction de la police judiciaire de la DGSN, 80% des affaires d'agression traitées par ce service de sécurité sont liées à l'usage des armes blanches. Les coûts sociaux liés à cet usage, comme les rixes, les suicides mais aussi et surtout dans le cadre d'activités criminelle, sont incalculables. Un médecin légiste nous indique que la facilité d'accès aux armes blanches engendre de sérieux dangers liés à leur manipulation. En cela, les réseaux de contrebande favorisent la prolifération de ces objets de mort. En juillet dernier, les services de la Douane algérienne avaient découvert 80 000 armes blanches lors d'une opération de saisie au port sec de Rouiba. C'était lors d'une opération de fausses déclarations qu'il a été permis de saisir 3 containers de pétards, 4 de pièces détachées usagées et 2 contenant des tracteurs de routiers démontés. Cette facilité de circulation des armes blanches suscite auprès des autorités compétentes des questions. Mais, aussi et surtout, que les parlementaires, les partis, les syndicats, les ONG, les associations de parents d'élèves et de quartier engagent un débat sur ce phénomène. L'absence de civisme est fortement relevée par nos interlocuteurs au niveau de la DGSN et la Gendarmerie nationale. Surtout que « l'Algérien, par tradition, aime porter un couteau sur lui », ne cessent de répéter certains officiers des ces deux corps de sécurité. En plus de cela, confient-ils, la parabole, les cassettes vidéo et les DVD inculquent la culture de la violence.