L'étau se resserre autour des proches et des collaborateurs du président tunisien déchu, Zine El Abidine Ben Ali. Après des membres de sa famille, son ancien homme-clé de la sécurité, Ali Sériati, a été arrêté hier, dans le sud du pays, alors qu'il tentait de s'enfuir en direction de la Libye. Accusé d'être le commanditaire des dernières exactions commises contre la population tunisienne au lendemain de la chute de Ben Ali, Ali Sériati a été interpellé par des éléments de la police et de l'armée et ramené à Tunis. «Le général Sériati a été placé sous mandat de dépôt après la présentation des chefs d'inculpation qui pèsent sur lui», rapportent des agences de presse qui citent des sources locales. «Une information judiciaire a été ouverte contre l'ancien directeur général de la sécurité présidentielle, le général Ali Sériati, et un groupe de ses collaborateurs pour complot contre la sécurité intérieure de l'Etat, incitation à commettre des crimes et à s'armer et provocation au désordre», affirme une source officielle dans une déclaration à la télévision publique tunisienne. «Le juge d'instruction du tribunal de Tunis a lancé en conséquence des mandats d'arrêt contre lui et ses collaborateurs», ajoute-t-elle. L'homme fort du régime Ben Ali est pointé du doigt d'abord par la population tunisienne, qui l'accuse d'être derrière les milices responsables des désordres récents dans la capitale et d'autres villes du pays. Des citoyens tunisiens ont attribué, dans des déclarations à des chaînes de télévision étrangères, les pillages et exactions commis samedi dernier à la garde raprochée de Ben Ali, qui chercherait à créer le chaos. Cette hypothèse est corroborée par l'ancien ambassadeur de Tunisie à l'Unesco, Mezri Haddad. Dans un communiqué rendu public, l'ancien diplomate accuse Ben Ali d'avoir «prémédité l'anarchie avant son départ du pouvoir» et de «téléguider les opérations». «J'accuse Ben Ali d'avoir choisi la politique de la terre brûlée en établissant une stratégie en trois phases. Il a donné des armes et beaucoup d'argent à sa garde rapprochée et à ses fidèles afin qu'ils provoquent la guerre civile dès son départ de Tunisie. Il leur a donné l'ordre de déclencher les opérations bien avant de prendre la décision de fuir. Il a sollicité l'aide de la Libye pour qu'elle intervienne», accuse-t-il. Mezri Haddad estime également que l'objectif du président chassé est de reprendre les commandes une fois le vent de la révolte passé : «Ce plan criminel et machiavélique n'avait qu'un seul objectif : reprendre le pouvoir.»
Climat toujours tendu dans le pays Outre l'arrestation du chef de la sécurité de Ben Ali, la chaîne satellitaire Al Jazeera annonce également l'arrestation de l'ancien ministre de l'Intérieur, Rafik Haj Kacem. Ce dernier a été limogé par Ben Ali quelques heures avant de quitter le pouvoir. Mais la situation risque de s'embraser dans le pays. Le retour au calme n'aura duré que quelques heures. La capitale, Tunis, a vibré, hier après-midi, au rythme d'un échange de tirs nourris entre les policiers et des personnes cachées dans les immeubles. Selon toujours les agences de presse, des tirs ont également été échangés un peu plus tôt dans la journée, devant le siège d'un parti de l'opposition, le Parti démocratique progressiste (PDP). Plusieurs personnes ont été arrêtées, dont deux étrangers. Pourtant, au début de la journée, les autorités provisoires avaient annoncé un allègement du couvre-feu en invoquant une amélioration des conditions de sécurité.