Il y avait du monde hier au salon rose de l'hôtel El Aurassi à Alger entre hommes d'affaires et officiels. Les couleurs du Brésil attirent. Les affaires aussi. Il s'agissait de réussir le premier forum sérieux d'opportunités d'investissements entre les deux pays. Luiz Fernando Furlan, ministre du Développement, de l'Industrie et du Commerce extérieur, et Silas Rondeau, ministre des Mines et de l'Energie, sont venus de Brasilia entourés d'une soixantaine de chefs d'entreprise et d'opérateurs économiques. Accompagnés de journalistes également. « Les Brésiliens sont déterminés à investir en Algérie. C'est à nous de faire de bonnes propositions », constatait, en coulisses, un cadre du ministère algérien des Affaires étrangères. Abdelhamid Temmar, ministre des Participations et de la Promotion des investissements, ne s'est pas privé de faire des « propositions », mais il a pris le soin de dire ceci : « Le Brésil, c'est l'Algérie dans dix ou quinze ans. » Il a loué les mérites du plan de soutien à la croissance économique qui est désormais doté de 60 milliards de dollars. A la télévision brésilienne, il a parlé de « plan Marshall ». « Le plan a démarré depuis 18 mois. Les projets engagés impliquent la participation de grandes entreprises », a-t-il précisé. M. Temmar n'a pas oublié d'évoquer le célèbre projet d'« un million » de logements. A la liste, il a ajouté : 1000 km d'autoroute à construire, 850 km de lignes ferroviaires, 6 ports et 8 stations de dessalement. L'agriculture, les technologies de la communication, les infrastructures et la pétrochimie sont, selon M. Temmar, des secteurs dans lesquels les Brésiliens peuvent investir. Le ministre a invité les hommes d'affaires brésiliens à s'intéresser à la SNVI, précisant qu'il existe un marché autant militaire que civil pour les véhicules industriels. L'idée d'une joint-venture pour cette entreprise publique est avancée. Luiz Fernando Furlan n'a pas caché le souhait de son pays de vendre des autobus scolaires et des semi-remorques à l'Algérie. « Nous produisons plus de 2 millions de véhicules légers et lourds par an et nous en exportons 800 000 », a-t-il indiqué. L'Associated Car and Truck (ACT), propriété de Yacine Rebrab, a signé un accord avec le groupe brésilien Randon pour l'assemblage de semi-remorques avec une perspective d'exportation. Présent dans 50 pays, Randon est le troisième constructeur mondial de semi-remorques. ACT a également établi un contrat avec San Marino Neobus, carrossiers d'autocars destinés au transport en commun. « Les entreprises à privatiser ont besoin de management et de technologie », a déclaré, pour sa part, Abdelhamid Temmar. Selon lui, le rythme des privatisations est de 20 entreprises par mois. Il n'a pas manqué de rappeler que 1000 entreprises publiques vont être vendues et que les négociations pour les cessions ne dureront pas plus de deux mois. Il a - pour probablement titiller l'orgueil brésilien - ajouté que l'Algérie est membre du marché européen après l'entrée en vigueur, en septembre 2005, de l'accord d'association avec l'UE. L'Europe, qui absorbe 25 % des exportations brésiliennes, arrive en tête des partenaires du pays du sucre et du café. Il est bon de savoir que le Brésil a exporté, durant les douze derniers mois, 107 milliards de dollars. L'objectif à atteindre pour 2005 est de 112 milliards de dollars. Luiz Fernando Furlan a souligné l'importance d'établir « des câbles avec l'Algérie » et de relancer la commission mixte entre les deux pays (elle est gelée depuis 1987). Il a évoqué la possibilité d'établir des liaisons aériennes entre l'Algérie et le Brésil via Lisbonne au Portugal. Son argument en cela est que 40 vols hebdomadaires assurent la liaison entre Lisbonne et sept Etats au Brésil, qui est une république fédérative. « Nous étudions sérieusement cette proposition et la possibilité d'ouvrir une ligne aérienne entre Alger et Lisbonne », a indiqué M. Temmar, lors d'une conférence de presse, en marge du forum. Annonçant la venue à Alger parmi la délégation du patron du constructeur aéronautique Embrair, le ministre brésilien a relevé qu'il y a possibilité d'achat par l'Algérie de jets pour le transport régional, de petits avions agricoles ou des appareils à usage militaire. Le Brésil souhaite faire bénéficier l'Algérie de son expérience dans l'énergie renouvelable. Silas Rondeau a plaidé la cause de l'éthanol, un alcool combustible qui permet à un million de véhicules de rouler sur les routes brésiliennes. « Le pays investit deux milliards de dollars pour la production de l'éthanol », a-t-il dit. Le modèle de l'extension électrique a été évoqué aussi par Silas Rondeau comme applicable en Algérie. L'interliaison électrique entre le nord et le sud du Brésil atteint les 4000 km, soit la distance entre Lisbonne et Moscou. En 2006, le Brésil va, selon lui, être autosuffisant en matière de pétrole (le pays a 20 ans de réserves). L'Algérie, deuxième fournisseur du Brésil en hydrocarbures, aspire à placer, d'une manière ou d'une autre, Sonatrach dans ce pays. C'est du moins ce qu'a laissé entendre Abdelhamid Temmar qui a rappelé la présence de la firme pétrolière en Amérique latine. Sonatrach a un projet actuellement au Pérou.