Le Parc national d'El Kala, qui a pour mission de protéger un inestimable patrimoine naturel, doit beaucoup à ses zones humides qui sont à l'origine de sa renommée internationale, et surtout à sa place en tant que principal centre de la biodiversité en Méditerranée. Les zones humides d'El Kala sont aujourd'hui sérieusement menacées, plus qu'auparavant, même après que certaines d'entre elles se furent littéralement asséchées. Non seulement parce qu'elles ont été concédées pour des activités de pêche insensées, mais surtout à cause de l'autoroute Est-Ouest, dont les travaux sont en cours en dépit du statut des parcs nationaux et des engagements des pouvoirs publics. Une nouvelle menace plane aujourd'hui avec un programme de réalisation de 5 barrages ; trois sont achevés, en travers de l'oued El Kebir et ses affluents qui, à terme, vont modifier profondément l'hydrologie régionale. En plus, il faut craindre que le projet hydro-agricole d'El Tarf, qui a pour objectif «d'assainir» les zones inondables agricoles, ne contribue à assécher définitivement cette immense et unique zone humide d'Afrique du Nord. Les progrès dans le savoir et la connaissance réalisés depuis 30 ans ne sont toujours pas venus à bout des mentalités qui considèrent les eaux d'épandage comme des ennemies et non comme une rare opportunité dont il faut savoir tirer profit. Une mentalité en fait confortée par la situation dans laquelle se trouve le foncier agricole. En effet, «les affairistes de la terre», qui ne cultivent pas les parcelles concédées pour des motifs bassement spéculatifs, se cachent derrière les inondations pour masquer leur laxisme, et leurs revendications sont prises au sérieux. Ce n'est pas un hasard si la côte d'El Kala est riche en diversité biologique. Les zones humides côtières que sont le lac Tonga, Mellah, les marais du Mekradda, et par extension le lac des oiseaux et le lac Oubeira, contribuent considérablement à la qualité de l'eau de mer de ce bout de littoral d'à peine 40 km, où ont pu s'installer les plus beaux herbiers de Posidonie et récifs coralliens de la Méditerranée. A leur tour, ces écosystèmes sont devenus l'habitat des nombreuses espèces de grand intérêt économique, culturel ou écologique et où certaines s'y reproduisent de manière exclusive.