Une catastrophe sanitaire majeure au Darfour au Soudan est à craindre dans les jours à venir. L'Organisation mondiale de la santé recommande, d'ores et déjà, de collecter des fonds, des fournitures et des ressources humaines accrus dans la région pour justement faire face à une éventuelle crise. Dans un rapport rendu public sur la situation sanitaire par l'OMS, il est signalé que le choléra, la dysenterie et le paludisme menacent la survie même de centaines de milliers de personnes déplacées. « Les gens meurent aujourd'hui parce qu'ils vivent dans des conditions totalement insatisfaisantes, mais le bilan risque d'être beaucoup plus lourd ces prochaines semaines si l'on ne parvient pas à éviter une funeste conjonction de plusieurs facteurs absence de moyens d'assainissement, malnutrition, manque d'eau potable et arrivée de la saison des pluies. Nous devons nous efforcer d'urgence d'éviter une catastrophe sanitaire. » Telle a été la conclusion du Dr Lee Jong-wook et le Dr Hussein Gezaïry, deux dirigeants de l'Organisation mondiale de la santé à l'issue de leur mission dans les camps et hôpitaux au sud et à l'ouest du Darfour. Le directeur régional de l'OMS pour la région de la Méditerranée orientale, Dr Hussein Gezaïry et Dr Lee, directeur général de l'OMS ont noté que, le mois dernier, l'action conjuguée du ministère fédéral de la Santé, des organisations non-gouvernementales, de l'Unicef et des autres organismes humanitaires internationaux a conduit à d'importantes améliorations en matière de santé. Selon les responsables de l'OMS, des progrès ont été enregistrés en ce qui concerne les secours, et notamment les soins de santé, ces dernières semaines. Les fonds disponibles ont été utilisés de manière efficace même s'il reste des obstacles logistiques à surmonter pour les principales opérations de secours. Les personnes et les camps disposant d'eau potable, d'un approvisionnement en vivres suffisant, de soins de santé primaires et de moyens d'assainissement adéquats sont plus nombreux. De nouveaux centres d'alimentation thérapeutique sont ouverts et les services hospitaliers au Darfour se sont améliorés. Une récente campagne de vaccination antirougeole de masse touchant deux millions d'enfants a permis d'éviter quelque 40 000 décès. « On pratique aussi la chirurgie de la cataracte chez l'adulte et l'on assure le traitement du trachome chez l'enfant », ont-ils-signalé. Moyens d'assainissement dérisoires L'état de santé physique et mental des femmes victimes de violences sexuelles et les besoins sanitaires à plus long terme des enfants suscitent également des préoccupations. « La crise au Soudan présente deux aspects, l'un politique et l'autre humanitaire », a souligné le Dr Lee. Et d'ajouter : « Des centaines de milliers de vies sont aujourd'hui en jeu et il faut aider les gens maintenant. Les efforts conjugués des autorités et de la communauté humanitaire sont en train de modifier le cours des choses. Nous lançons un appel énergique pour que l'aide extérieure soit accrue, que les moyens soient fournis de faire face à la crise et que les risques sanitaires soient réduits. » L'OMS estime que si des secours humanitaires de masse ne sont pas immédiatement apportés à la population, le nombre de décès quotidiens au Darfour va augmenter en flèche. Une flambée de choléra est également à craindre dans certains camps selon le Dr Lee et le Dr Gezaïry qui ont évalué la situation sanitaire au camp de Kalma à la périphérie de Nyala dans le sud du Darfour. Ce camp abrite plus de 50 000 personnes et l'on dénombre 300 nouvelles admission chaque jour. Les moyens d'assainissement font particulièrement défaut. « L'OMS et ses partenaires sanitaires peuvent agir ensemble pour éviter une flambée de choléra en apportant des fournitures à l'avance et en vaccinant les sujets sensibles », a expliqué le Dr Gezaïry. « De telles activités impliquent un effort financier, mais le coût d'une flambée et des nombreuses victimes qu'elle provoquerait dépasserait de loin le coût de la prévention. » ont-il souligné. Pour le Dr Guido Sabatinelli, représentant de l'OMS au Soudan : « A court terme, une telle action permettra d'atténuer les souffrances de ceux qui ont besoin d'une aide d'urgence. Mais il s'agira aussi d'un investissement à long terme en faveur de la santé dans une région confrontée à une insuffisance chronique de lits d'hôpitaux, de moyens de santé maternels, de chirurgiens et d'autres spécialistes ». Par ailleurs, l'ONU estime à 240 millions de dollars le coût total des secours humanitaires. Jusqu'ici, les contributions annoncées n'atteignent pas la moitié de ce montant. Il faut à l'OMS environ 1,2 million de dollars par mois pour poursuivre ses opérations dans les trois états du Darfour.