L'association Méditerranée en danger prépare sa deuxième expédition en mer Méditerranée cette année, et elle passera par l'Algérie. Il s'agit de déceler les micro-fragments de plastique, source d'une potentielle catastrophe écologique majeure. Lyon. De notre correspondant La Méditerranée est-elle en train de devenir une «soupe de plastique» ingérée par les poissons et même le plancton, base de toute la chaîne alimentaire ? Ces microfragments de plastique sont-ils les premiers composants d'une future «bombe à retardement écologique» ? Ce sont là les interrogations de Méditerranée en danger, en initiales MED, dont le nom même rappelle la mer qu'il s'agit de protéger, s'il en est encore temps. Ces questionnements sont vécus douloureusement en Algérie, et surtout en été en bord de mer, avec ces milliers de bouteilles et de sachets jetés n'importe où, et ces éclats de plastique dans l'eau. Combien y-a-t-il de déchets plastiques en mer ? A vue d'œil, beaucoup ! Peut-on s'en faire une idée scientifiquement fiable ? Une première campagne de l'expédition MED avait eu lieu en juillet et août 2010, durant trente jours de navigation sur le littoral français, dans le nord de l'Italie et de l'Espagne, avec près de 1500 milles nautiques parcourus. Inédit en France et en Europe, ce programme de recherche met en lumière un phénomène alarmant, la présence d'une pollution quasi invisible, susceptible de rentrer dans notre chaîne alimentaire : les micro-fragments de plastique. Le constat est d'ores et déjà inquiétant, la cinquantaine d'échantillons d'eau prélevés en surface montrent pour certains, des quantités frappantes de petits débris plastiques, de la taille de confettis. Dans neuf des stations visitées, le nombre de micro-déchets flottants atteint en moyenne 115 000 éléments par kilomètre carré, avec un impressionnant taux maximum rencontré de 892 000 éléments. Des résultats de leurs recherches, les responsables de MED ont pu extrapoler qu'il y aurait environ 250 milliards de micro-déchets flottants pour l'ensemble de la Méditerranée ! Fort de cette première expédition, un deuxième temps fort est annoncé cette année 2011, entre juin et août, avec cette fois un passage par les côtes de Tunisie, du Maroc et d'Algérie, en lien avec des partenaires locaux, dont l'AEB, association écologiste de Boumerdès. Le responsable de l'opération, Bruno Dumontet, nous a indiqué que la constitution d'un réseau est en cours, et la finalisation du parcours, en collaboration avec un collectif d'associations des pays du pourtour méditerranéen, un engagement et une action citoyenne en ligne à l'échelle européenne et méditerranéenne : «Nos contacts sont bien avancés, et les demandes d'autorisation ont été déposées auprès des services concernés dans chacun des pays où nous passerons. Pour l'Algérie, le périple devrait nous amener une première fois, avec une étape à Alger. Là nous souhaiterions faire de l'animation autour de notre projet». Notre interlocuteur nous précise qu'une deuxième halte devrait se faire en Algérie. Récemment, à la tête d'une délégation de MED, il a rencontré les autorités françaises du ministère de l'Ecologie : «Nous avons eu une bonne écoute, les premiers résultats de notre première expédition nous apportent le sérieux de notre entreprise, la lisibilité de notre action. On nous prend au sérieux», nous dit Bruno Dumontet. «Par la mobilisation et la solidarité, nous souhaitons éviter de continuer, à contaminer la mer Méditerranée et par la même occasion les autres mers et océans. Nous proposons aux populations d'agir en s'engageant à réduire leurs productions de déchets, favoriser leurs réutilisations et leurs recyclages et pour limiter cette pollution à la source, exiger du Parlement européen, par une pétition internationale, «un cadre juridique européen renforcé sur l'éco conception des produits de consommation, la limitation des produits jetables à usage unique et une législation contre le suremballage». Cette pétition, actuellement en français sur le site de MED, sera très prochainement accessible aussi en arabe : «Nous savons qu'au Maghreb, la langue française est usitée et comprise, mais il nous paraît important aussi de relayer notre message dans la langue locale». Enfin, pour appuyer son action, le collectif MED, composé d'environnementalistes, de scientifiques européens, d'artistes et d'enseignants, est en relation avec les autres ONG qui dans le Pacifique, ou en Atlantique, mènent le même combat : «Nous échangeons nos données, nous prêtons du matériel, collaborons au cours de nos expéditions». L'Expédition MED ambitionne également de mettre en place un réseau constitué de centres de recherche et d'associations environnementalistes mobilisés pour la protection de la biodiversité marine en Méditerranée et la lutte contre les déchets en mer». Il serait plus que temps d'agir pour arrêter l'invasion étouffante de la mer.