Ould Abbès dégage», «Promulguez notre statut», «Statut et dignité», ce sont là les slogans scandés par le personnel paramédical depuis le 8 février dernier, date de l'entame de leur action de protestation illimitée. Depuis cette date, les hôpitaux et les polycliniques du secteur public fonctionnent au ralenti, mais cela ne semble pas inquiéter nos responsables en haut lieu. Les pouvoirs publics, à leur tête le ministre de la Santé et de la Réforme hospitalière, n'ont pas daigné se rapprocher de ces travailleurs, s'inquiéter de leurs préoccupations et tenter de trouver des solutions au fond des problèmes posés. Ould Abbès ne fait que multiplier les communiqués incendiaires, irritant ainsi les grévistes. Face à l'indifférence et au mépris affichés a leurs encontre, les paramédicaux ont opté pour la poursuite de leur mouvement de protestation tout en promettant sa radicalisation dans le cas ou la tutelle continue à se confiner dans son mutisme. Manque de considération Rencontrés dans les différents hôpitaux (CHU Mustapha, ex-Maillot, Belfort, Kouba...), les infirmiers pensent qu'ils ne sont même pas considérés comme des diplômés d'Etat mais comme de simple «farmli». Ce mot est vomi par les fonctionnaires de ce corps. «Si vous saviez comme les paramédicaux ont horreur de ce mot. Nous sommes des techniciens supérieurs, nous assistons les chirurgiens dans les blocs opératoires, les praticiens lors des consultations. Notre tâche ne se limite pas à la réception des dossiers des malades», fulmine une infirmière. Dans la cour de l'ancien hôpital Maillot (Debaghine actuellement), les infirmiers – leur blouse blanche porte une petite inscription : «paramédical en grève» – discutent de leurs problèmes. Pour rendre visible leur mouvement, ils ont marché hier dans l'enceinte de l'hôpital avant de s'arrêter devant la stèle érigée à la mémoire des praticiens et infirmiers mort lors des inondations de Bab El Oued. Le ras-le-bol est palpable. «Malgré les sanctions qui ont touché certains de nos collègues et les pressions exercées sur nous par l'administration, nous tenons bon. Nous avons appris que des grévistes ont été rétrogradés et d'autres ont été destinataires de réquisitions les obligeant à demeurer dans leurs services respectifs. Cela est contraire aux lois de la République», lance un infirmier, qui s'interroge sur le droit à la grève et sur l'exercice de l'activité syndicale ! «Ould Abbès doit comprendre que les infirmiers ont eux aussi le droit de se révolter et d'exiger l'amélioration de leur conditions de travail», note un syndicaliste. Les infirmiers expliquent qu'ils sont au chevet des malades à longueur de journée, qu'ils travaillent sous pression et dans des conditions catastrophiques : «Nous préparons les cures de chimiothérapie, nous assurons les gardes, nous accompagnons les cancéreux en phase terminale… et nous sommes les plus mal lotis. M. Ould Abbès ne devrait pas nous sous-estimer», s'énerve une infirmière. Scandalisé par les déclarations du ministre de la Santé, un autre paramédical rappelle à qui veut l'entendre que les infirmiers ne sont pas des robots ni des minables. Dans les jardins de l'hôpital Mustapha, tout y passe. Chacun y va de son commentaire. Pouvoir d'achat érodé «Nous subissons, en plus de la pression, toutes les insultes du monde, s'il y a un petit problème dans les services c'est le paramédical qui paye. Alors que les salaires que l'on nous donne c'est à peine s'ils nous permettent de survivre», s'indigne un infirmer qui rappelle à Ould Abbès qu'avec 25000 DA on ne peut pas subvenir aux besoins d'une famille modeste, notamment avec la cherté de la vie. «Nous ne demandons pas la charité, nous voulons un salaire digne et nous voulons des responsables compétents à la tête des services. L'administration n'est pas à notre écoute, elle est plutôt du côté de la tutelle», s'insurge un infirmier. Selon les paramédicaux que nous avons interrogés, la nouvelle grille des salaires n'a rien changé à leur situation. «Si on a recours a des grèves, c'est que rien n'a été appliqué», nous dit-on. A propos du statut des paramédicaux, le porte-parole du SAP souligne que «le projet de statut dont a fait part le ministre et déposé à la Fonction publique… ne peut aboutir et est sans aucune valeur», dès lors que ledit projet n'avait pas ce que le syndicat appelle «l'ancrage juridique», puisqu'il n'était pas appuyé par le protocole d'accord LMD liant les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur, ni par le décret sur la formation des paramédicaux. Les infirmiers tiennent enfin à décliner toute responsabilité quant aux risques d'enlisement de la situation et que toute «la campagne médiatique menée tambour battant pour casser la dynamique du SAP a échoué et a eu l'effet inverse». «Les paramédicaux sont la cheville ouvrière de tous les services, le ministre doit comprendre cela comme il doit savoir que nous ne renoncerons pas à notre grève si nos revendications ne sont pas prises concrètement en charge», note M. Ghachi, du SAP.