L'avènement du printemps est solennisé en préparant un mets appelé Seksou uderyis fait à base de couscous et des racines du faux fenouil. Il est de coutume dans la société kabyle de célébrer plusieurs journées marquant le passage d'une saison à une autre, l'arrivée de la neige, la pluie, la récolte d'olives, la moisson…. Des fêtes qui dénotent un profond attachement aux valeurs, vertus, us et traditions du peuple kabyle. Le calendrier agraire amazigh, qui est une référence non négligeable pour tous les travaux agricoles et aux périodes de végétation, est scindé en deux grandes périodes: semailles et labours (automne et hiver) ; moissons et récoltes (printemps et été). Le 28 février du calendrier grégorien équivaut au 14 mars du calendrier berbère, donc l'arrivée du printemps pour les Amazighs. Les changements climatiques et floristiques ont de tout temps été suivis avec grande attention par les Kabyles, car leur principale activité se focalise sur le travail de la terre, donc des paysans. La nature opère sa mue en période printanière, dont l'arrivée ne passe pas inaperçue chez les Kabyles. Les Ath-Ouaghlis, à l'instar des autres tribus, solennisent l'avènement du printemps en préparant un mets appelé Seksou uderyis fait à base de couscous et des racines du faux fenouil de son nom scientifique thapsia gargnaica, que l'on appelle en kabyle aderyis. Cette fameuse plante est à cueillir avec précaution, car le contact de certaines parties du corps avec ses racines peut causer des démangeaisons et boursouflures qui vont crescendo. Ce plat traditionnel est souvent accompagné des œufs durs, des légumes secs communément appelé «imensi n'tefsut». Les femmes s'affairent allégrement à préparer ce mets en mettant en valeur leur savoir-faire culinaire afin que toute la famille puisse se régaler, en ajoutant du sucre ou du miel pour mieux accompagner ce plat consistant dont les chérubins en raffolent. L'arrivée de la saison de la floraison est fêtée en liesse et allégresse, en organisant des activités conviviales et ludiques. Aglilez n'tefsut est l'un des jeux préférés en Kabylie et qui consiste à se rouler sur l'herbe à la gloire de la déesse de la nature. Mais force est de constater que les rites et mœurs, jadis entretenus jalousement, n'ont plus la cote auprès de la nouvelle génération. Des gestes et faits évanescents, à telle enseigne que beaucoup soulignent que la culture kabyle est menacée de se dissiper si rien n'est fait pour la conserver. «C'est exactement dans ce créneau que les associations doivent s'investir afin de pérenniser le legs de nos aïeux, et faire en sorte que les nouvelles générations soient conscientes de la richesse et de la diversité culturelle léguées par nos ancêtres», insiste vivement un sexagénaire.