Le régime de Abdelaziz Bouteflika s'est mis à dépenser à tout bout de champ les deniers de l'Etat ; une opération qui s'apparente à une volonté délibérée de vider les caisses. En effet, pour avoir la paix sociale, son gouvernement a décidé d'aller nettement au-delà des revendications de certaines catégories socioprofessionnelles. C'est une bonne chose que les policiers aient été augmentés, par exemple, leur pouvoir d'achat ayant été érodé par l'inflation. Mais comment expliquer l'effet rétroactif de trois ans, alors qu'ils n'ont jamais avancé une revendication de ce genre et à laquelle ils n'ont même pas rêvé ? Le pouvoir a ouvert la boîte de Pandore. Désormais, tout le monde peut exiger non seulement des augmentations salariales, justifiées ou injustifiées, mais aussi avec des rappels sur plusieurs années. Après tout, pourquoi pas ? Les membres des chambres d'enregistrement comme les députés et les sénateurs touchent bien des salaires faramineux, alors qu'ils ne sont d'aucune utilité pour le pays, leur seule mission étant d'approuver, d'applaudir et de faire des courbettes au maître du moment. Parce qu'il est illégitime, incompétent et médiocre, le pouvoir a incontestablement peur de ses citoyens. Il réagit par à-coup à des situations qui nécessitent des solutions sérieuses et bien réfléchies. A la première alerte, il a par exemple annulé de logiques mesures destinées à combattre l'informel, encourageant ainsi le commerce illégal et accentuant le marasme économique par une démission de l'Etat face aux dealers en tout genre. Le pillage des richesses nationales par des gens du régime et la généralisation de la corruption valent bien tous les abandons.Mais le régime a franchi le Rubicon avec des augmentations anormales des salaires et qu'aucun budget ne peut supporter. Il sait qu'il va ainsi provoquer une terrible inflation qu'aucun remède ne peut contenir. Il sait qu'il va provoquer une catastrophe financière qui hypothèquera l'avenir de l'Algérie, et son pétrole et son gaz n'y pourront rien. Le régime a décidé de réduire l'Algérien à un tube digestif dans l'espoir qu'il mette de côté son désir légitime de liberté, de démocratie, de gestion transparente des affaires de l'Etat. Le prince du moment est déterminé à vider les caisses de l'Etat. «Après moi le déluge», semble-t-il dire. On est même en droit de soupçonner qu'il rêve de laisser le chaos après son retrait de la scène politique. C'est ce qu'on appelle la gestion par et pour le pire. A moins d'un sursaut d'orgueil et de patriotisme de la partie saine de la société, l'Algérie est promise à un avenir sombre.