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Georges Darien, littérature coloniale et anarchie
Publié dans El Watan le 08 - 12 - 2005

De Paris à Alger, le chemin du sentimentpeut-on faire de la littérature avec de mauvais sentiments ? La question vient en lisant un article consacré le 16 septembre 2005 par Le Monde des livres à Georges Darien né en 1862 et mort en 1921.
Cette époque, prise dans une large perspective, est mauvaise, inclinant aux mauvaises pensées ce que la littérature compte de meilleur. Coup de sang de Flaubert accusé d'immoralité, coup de gueule de Maupassant faisant d'une prostituée, boule de suif, un parangon de vertu patriotique. En fallait-il du mauvais sang pour produire des œuvres belles et fortes, anti-bourgeoises, anticonformistes, antimilitaristes. Anti ... tout ce qui représente l'étroitesse du cœur et de l'esprit. Il restait encore à ces grands auteurs un rien de tendresse pour des petits personnages, suffisamment pour en faire d'impossibles héros dans un monde dégradé. Georges Darien vient un peu plus tard. Les temps ont empiré. Le Second empire, la guerre de 1870 et sa sanglante séquelle, la Commune de Paris, obligent aux prises de position et à la faute. La bourgeoisie française encourage les massacres et réclame toujours plus de sang. Le grand Emile Zola, lui-même, poursuit de sa haine les communards. Dans ce climat de violence et de bassesse, comment résister à l'« antitoutisme » ? Georges Darien opte pour l'anarchie et la « barbarie intolérante et immiséricordieuse ». Il déteste tout, y compris l'humanisme et les bons sentiments. Biribi, Bas les cœurs, Le Voleur vomissent le trop-plein d'une sensibilité à fleur de nerfs, dégoûtée par la médiocrité. Les temps sont mauvais et créateurs. Tandis que Caserio assassine le président Sadi Carnot, Darien crache sa haine des guerres et des militaires, de la bourgeoisie, de la passivité, de la résignation. De tout. Y compris des anarchistes jugés trop timorés. L'homme bâtit son œuvre, sa vie à coup de mépris et de haine, finissant par se retrouver si seul qu'il commet l'irréparable : il se fait battre aux élections législatives et municipales de 1912, auxquelles il avait eu l'imprudence de se présenter. Il ne lui reste plus qu'à lancer à la fin du meilleur de ses livres, Le Voleur : « Ah ! Chienne de vie ! ... » Chienne de vie en France. Et à Alger ? A Alger, les choses ne vont pas mieux, mais au moins c'est plus rigolo. Quelque 60 ans après la conquête de 1830, la littérature coloniale commence à livrer ses premières productions avec Musette, alias Auguste Robinet. Entre 1896 et 1920, l'écrivain d'Alger publie les aventures de Cagayous, roi des Salaouètches. La période coïncide grosso modo avec celle de l'anarchie de Georges Darien, me laissant penser que le courant passait plutôt bien entre la métropole et la colonie, puisque ce Cagayous, truculent héros populaire, est lui aussi anarchiste. Mais « entention ! » Anarchiste à la manière algéroise. « Louette » dégourdi, astucieux. Voyou mais gentil. Comme si le soleil adoucissait les mœurs. Le peuple d'ici, il est chouette, si chouette qu'il mérite une bonne politique. Alors Cagayous fait comme Darien, il se présente aux élections législatives, mais pas par désespoir. Il croit en sa mission de sincérité populaire. « Le député d'Alger y faut qui ressemble à le peuple d'ici, aussi non c'est la contrebande ». Et le bon peuple d'Alger d'applaudir, surtout que le candidat promet que s'il est élu, les transports seront « battel », de même que pour le « tréatre » qui sera à l'œil. « Le nabab-el-oued y veut que le pays soit riche et que tout le monde y soye content ». Pour ça, il est même prêt à donner à « çui-là qu'il a besoin d'argent », l'adresse de « ceuss-là qui z'en ont beaucoup ». Voilà ! Vive nous ! Vive Cagayous, candidat Antitout. D'où est sorti ce personnage ? Musette avait-il appris que de l'autre côté de la Méditerranée, l'époque était mauvaise, faisant tourner en cage la rage de Darien ? Aux hommes qui menaient là-bas une « chienne de vie », voulait-il proposer un « héros algérien », « vivante incarnation de la plèbe néo-française d'Algérie », un nouveau sang mêlé d'espagnol, d'italien et d'arabe, dont la tonicité était décapante ? Et puis faisait-il tellement meilleur par ici ? Le programme de Cagayous ne laisse pas de doute sur la distribution inégale de la manne coloniale, et la gabegie politique. Alors ? Alors, il semble que la littérature fasse plus que s'accommoder des mauvais sentiments. Par temps de bassesse et de médiocrité, le mauvais sang va bien aux écrivains surtout quand l'humour et l'ironie s'en mêlent (Maupassant mieux que Flaubert, Musette mieux que Darien, question de goût). Reste à savoir pourquoi certains d'entre eux jouent dans la cour des grands, alors que les autres ne peuvent même pas espérer voir leur nom figurer dans un manuel scolaire. L'ordre bourgeois et sa morale veillent et contrôlent. Les « anarchistes » passent à la trappe de l'histoire littéraire parce qu'ils ont du ressentiment, oublieux de l'humanisme basique et tolérable. Et pourtant ! Si vous saviez comme ils les aiment les hommes. Ils les aiment tellement, qu'ils veulent les voir dans la posture d'hommes costauds, courageux, louettes et tout. Aussi non, c'est la contrebande d'humanité. Bon sang ! Quels bons sentiments.

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