Voici un système, le LMD, qui régit avec bonheur les dispositifs de l'enseignement supérieur des pays scientifiquement avancés, pays où se produisent les concepts et où se développe la technologie. L'Algérie, forte de ses expériences dans le domaine de l'enseignement supérieur, a accompagné à bon escient sa réforme de l'enseignement supérieur par ce système. Tous les acteurs avaient été conviés à engager les débats les plus larges pour enrichir et adapter certains principes de ce système aux réalités de l'enseignement supérieur algérien. Des débats fructueux ont permis la mise en œuvre du LMD dès septembre 2004. En un temps réduit, il a montré de réelles aptitudes : le visage de l'université transformé, l'offre de formation émane désormais des enseignants, le travail personnel de l'étudiant valorisé. Alors, pourquoi cette dramatisation autour du LMD ? Si des préoccupations exprimées sont légitimes et leur prise en charge ne peut être que constructive, hélas certaines sont inacceptables car elles entretiennent la crainte. Le nouveau bachelier a peur des études, il a aussi peur de la science, car elle ne lui a pas été expliquée, comme ne lui ont pas été expliquées ses immenses avancées et l'avantage qu'il peut en tirer. Il a peur de la mondialisation, il ne sait pas ce que c'est. On lui a expliqué la mondialisation sous un angle réducteur : la domination de l'Occident sur le reste du monde, alors qu'elle peut représenter «l'intersolidarité et la compréhension» entre les peuples. Il ouvre le journal, son attention est attirée par de gros titres jugeant le système sans en avoir le recul nécessaire. Il ouvre la chaîne nationale de télévision, et il en est de même. Il se rend à la faculté, sa peur n'est pas apaisée non plus. La désinformation prend alors le dessus, elle devient en partie convaincante. Des qualités du LMD telles que la reconnaissance du diplôme ou la gestion du temps pédagogique sont saisies par certains milieux pour construire un argumentaire stigmatisant le LMD lui-même. Paradoxal ! A ce propos, il est nécessaire de rappeler que : - les diplômes du LMD ont une valeur reconnue, car ils sont lisibles, visibles et comparables dans les pays scientifiquement avancés grâce au système de crédits et à l'annexe au diplôme. - Le temps pédagogique au LMD est mesuré pour tenir compte des activités d'enseignement théorique, pratique et transversal. En Algérie, ce temps pédagogique oscille entre 350 et 375 heures «présentielles» par semestre. Ce temps se situe entre 660 et 750 heures par semestre si on y inclut le travail personnel de l'étudiant. - Le LMD a permis à l'université algérienne une réelle ouverture en s'adossant sur une activité accrue dans le domaine de coopération et des relations internationales. L'approche par compétence ou la prépondérance du LMD Le système LMD s'appuie sur les avancées de la pédagogie. Il prépare l'étudiant au comment de s'approprier, de désapproprier et de se réapproprier des savoirs et des connaissances qu'il pourra réinvestir dans des situations réelles. Essayons de voir au moins deux différences essentielles entre le LMD et le traditionnel. Un parcours de formation en LMD est divisé en objectifs spécifiques cohérents à atteindre, alors que le système traditionnel se fixe un objectif global à satisfaire. Les objectifs spécifiques cohérents guident l'étudiant vers l'approfondissement, l'objectif global donne une vue généraliste de l'objet étudié. - Le LMD place l'acteur universitaire — l'étudiant et l'enseignant — dans un contexte de savoirs en construction dynamique du fait que les programmes sont conçus, combinés et mis à jour par les équipes pédagogiques formées d'enseignants. Le système traditionnel garde l'étudiant dans un cadre de savoirs stables, où les possibilités d'amélioration sont lourdes à mettre en œuvre. Se pose alors la question de la correspondance du diplôme d'ingénieur avec le master, pour ne citer que ces deux finalités. Il se peut être indécent de se lancer dans une comparaison qui n'a pas lieu d'être. Le diplôme d'ingénieur est dorénavant délivré que par les écoles nationales, le master est délivré par les universités où l'étudiant est appelé à maîtriser l'accès aux innovations technologiques et aux pratiques émergentes. Il est clair que la rumeur se nourrit de l'incertitude, de la porosité et du mal d'information ; apparaissent alors des possibilités de construire un «argumentaire» pour pallier ce manque. Pour y faire face, une attitude managériale est cruciale. Celle-ci passe par les moyens à déployer pour améliorer la communication et la responsabilisation. Parmi ces moyens, citons la semaine d'intégration bien encadrée à chaque rentrée universitaire, le tutorat approprié impliquant enseignant étudiants, un module transversal au premier semestre dédié à l'explication du règlement des études, du système LMD, des parcours de formation… On peut aussi citer la démarche scientifique. Celle-ci consiste à apprendre à l'étudiant la rigueur et la méthode dès sa rentrée à l'université et même en amont. Il montera en puissance dans la compréhension de la valeur du travail et la nécessité des sacrifices. C'est la responsabilisation. Les tentatives répétées de dramatisation du LMD n'est-elle donc que dans la vague de fond d'une centaine nostalgie, ou elle est habilement entretenue pour des objectifs inavoués ?