Même lieu, même scène et même scénario. La Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) a été empêchée, pour la énième fois, de marcher à Alger. En effet, la place du 1er Mai, d'où devait s'ébranler la procession des manifestants en direction de la place des Martyrs, a été hermétiquement quadrillée par un impressionnant dispositif policier dépêché sur les lieux dès les premières heures de la matinée. L'intention était claire : il ne faut pas tolérer une marche pour le changement du système, après un discours du président de la République. Le décor était donc planté bien avant l'heure du début de la manifestation. Les représentants de la CNCD, arrivés un peu plus tôt, ont vite été encerclés par des policiers qui ont tenté de les repousser loin de la place du 1er Mai. Arrivé vers 11h, la figure de proue de la coordination, Ali Yahia Abdennour, a eu lui aussi le droit au même traitement. Accompagné de Me Fetta Sadat et quelques militants du RCD, Ali Yahia Abdennour s'est retrouvé encerclé par un cordon composé d'une vingtaine de policiers qui empêchaient même les journalistes de l'approcher. Quelques minutes plus tard, d'autres manifestants, environ une trentaine selon nos estimations, ont pu échapper à la vigilance des policiers et rejoindre Ali Yahia Abdennour sur le trottoir mitoyen de l'hôpital Mustapha Bacha. Et la marche s'est transformée en un rassemblement qui aura duré plus d'une heure. Approché par nos soins, Ali Yahia Abdennour a préféré commenter le discours prononcé la veille par le chef de l'Etat. «Le discours du Président était un non-événement. Il n'a pas parlé des marches, alors qu'il y a eu durant les 3 derniers mois plusieurs manifestations, dont la plus importante est celle des étudiants. Elles (les marches) sont plus importantes, non seulement pour la réforme de l'université, mais aussi pour la démocratie, les libertés et les droits de l'homme. Il n'a pas tenu compte de cela», lance-t-il. Pour le vieux militant des droits de l'homme, le président Bouteflika n'a annoncé que des «réformettes». «Le président de la République doit laisser la place à la jeunesse qui a été formée depuis l'indépendance. Elle a la technique, l'intelligence et la culture et elle est en mesure de sortir le pays du marasme actuel et d'adhérer au XXIe siècle. Le pays a besoin de démocratie qui veut dire le retour à la souveraineté du peuple et la consécration de la citoyenneté», ajoute-t-il. Selon lui, la CNCD veut aujourd'hui, à travers sa démarche, une deuxième libération du peuple algérien. «Le président de la République est malade, il doit aller se soigner et laisser la place à la génération post-indépendance», lance-t-il.