Une journée d'étude en hommage à l'écrivain, anthropologue et linguiste algérien, Mouloud Mammeri (1917-1989), s'est tenue à l'université de Tizi Ouzou. Cette rencontre, durant laquelle l'œuvre de l'enfant de Taourit Mimoun (Ath Yenni) a été décortiquée, se veut aussi une occasion pour se recueillir à la mémoire des martyrs et des victimes de la répression du 8 Mai 1945 par l'armée coloniale française. «Le 8 Mai est une date symbolique dans l'histoire de l'Algérie. A cette occasion, nous voulons faire d'une pierre deux coups : commémorer le 66e anniversaire du 8 Mai 1945 et honorer la mémoire de Mouloud Mammeri par des conférences et des lectures d'extraits de son œuvre dans les langues française, amazighe, arabe et anglaise, pour l'ouvrir à tous les publics et faire en sorte que les étudiants se réapproprient ce patrimoine culturel qui leur appartient», dira Mme Boukhlou, enseignante au département de français de l'université de Tizi Ouzou. Dans sa communication intitulée «Le parcours de Mammeri : du particulier à l'universel», la conférencière a tenté de démontrer que le roman La Colline oubliée, première œuvre de Mouloud Mammeri, contestée dès sa parution en 1952 et plus tard, porte les germes de la spécificité et de l'universalité en même temps. «Car l'auteur était imprégné de sa propre culture et nourri à d'autres, qui l'ont enrichi en faisant de lui une figure emblématique», relatera encore Mme Boukhlou. Mme Aït Aïder, enseignante au même département, a présenté une lecture sémiotique du même roman. En s'appuyant sur des outils d'analyse empruntés à la sémiologie littéraire, qui se base sur les conditions de la production du sens, l'oratrice estime que «La Colline oubliée est loin d'être interprétée comme étant un simple inventaire de coutumes et de traditions berbères». L'intervenante a, par ailleurs, mis en exergue la dense toile figurative dont dispose le roman. Mme Betouche, enseignante au même département aussi, a fait une autre lecture sémiotique de La Traversée, roman édité en 1982 aux éditions Plon (Paris). L'oratrice a étalé une lecture qui repose sur les principes de la théorie pragmatique liée à la «philosophie du langage ordinaire» développée par le philosophe anglais John L. Austin (1911-1960) dans Quand dire c'est faire (1962). Elle a établi une relation interlocutive pour montrer «les défaillances de langage usé» dans deux séquences du roman, où même le silence fonctionne comme un «acte de langage», ou comme un moyen mis en œuvre par l'auteur pour agir sur le lecteur. Mlle Chefioui, de l'université d'Alger, évoquera les figures féminines dans l'Opium et le Bâton (1965), un roman témoignage où il est donné une grande place à la femme. L'assistance a, par ailleurs, suivi une lecture polyphonique d'extraits des romans, La Colline oubliée, La Traversée et L'Opium et le Bâton.