La relance de l'économie agricole que les pouvoirs publics se sont fixé comme objectif prioritaire à travers la mise en œuvre de divers programmes de développement du secteur et la réforme de la législation régissant le secteur de l'agriculture n'est pas encore au rendez-vous. La situation dans laquelle se débat toujours la production animale, toutes filières confondues, reflète aisément ce constat. Du moins, les nombreux professeurs et chercheurs dans le domaine des sciences agronomiques, qui ont pris part à la 6e édition des journées de recherche sur les productions animales, organisée par la faculté d'agronomie de l'université Mouloud Mammeri de Tizi Ouzou les 9 et 10 mai, sont unanimes sur cette question.Certes, les pouvoirs publics affichent une volonté d'aller vers la consolidation du secteur agricole, dans ses différents segments, mais l'Algérie est encore loin de garantir une couverture satisfaisante des besoins locaux par la production nationale. Les vulnérabilités sur ce plan sont tellement multiples et le défi à relever tellement majeur, que le débat sur la sécurité alimentaire devient une chimère. En tout cas, en se penchant sur les productions animales, le point qui mérite le plus d'être relevé à l'issue de la rencontre scientifique qu'a abritée l'université de Tizi Ouzou la semaine dernière est celui relatif au rendement des élevages. Car même si des avancées ont été enregistrées, notamment au niveau de la restructuration des exploitations agricoles et du soutien au profit des agriculteurs, le rendement du secteur est toujours en deçà des niveaux escomptés. Intervenant sur le thème d'«une approche territoriale pour un développement durable des productions animales», le professeur K. Abbas de l'INRAA (institut de recherche agronomique) estime que «les progrès réalisés dans ce secteur, en grande partie par un élevage avicole industriel et peu maîtrisé, un accroissement du cheptel laitier par un flux massif de races exotiques et un important et artificiel des effectifs ovins, ne se sont malheureusement pas associés à une amélioration durable de la productivité technique ». 10 litres/jour par vache seulement Le professeur Iguer Ouada de l'université de Béjaïa, lui, reviendra sur les carences au niveau de la filière laitière dont le rendement demeure moribond dans son exposé sur «l'état des lieux et perspectives de développement de la reproduction et la production laitière en Algérie». Pour lui, «plusieurs stratégies de développement et des mesures d'incitation ont été entreprises, (…) comme l'amélioration de la génétique laitière à travers l'importation de génisses, le soutien de l'insémination artificielle, l'incitation à la collecte à travers des primes pour les producteurs, les collecteurs et les transformateurs. Cependant, peu de mesures sont entreprises pour l'amélioration (du rendement par vache). Aujourd'hui encore, les performances sont de l'ordre de 10 litres par jour. Néanmoins, peu de travaux scientifiques existent sur la description de la production laitière dans l'élevage algérien». Dans ce cas de figure, le marché international reste l'ultime recours pour subvenir aux besoins alimentaires d'une population en constante croissance. A cet égard, Dr Kheffache du CREAD (Centre de recherche en économie appliquée pour le développement) relèvera que l'Algérie est le 15e importateur mondial de viande et, pour les produits laitiers, l'Algérie figure parmi les plus grands importateurs de lait. Elle est classée au premier rang africain et, avec ses 35 millions d'habitants et une facture annuelle moyenne de 800 millions d'euros, elle est au même niveau d'importation que la Chine avec ses 1,3 milliard d'habitants et de l'Union européenne à 27». Pour renverser cette situation, qui ne reflète que l'ampleur de l'insécurité alimentaire de l'Algérie, estime-t-elle encore, il est nécessaire d'en finir avec les lacunes dont souffrent les différentes filières au niveau de l'exploitation, entre autres, l'insuffisance de la maîtrise des techniques d'élevage, l'informel qui prédomine dans les circuits de commercialisation, la faible organisation des professionnels des filières animales, la taille réduite des exploitations qui limite toute possibilité de réaliser des économies d'échelle.