Les établissements de vente de boissons alcoolisées à emporter, en plein centre-ville de Béchar, sont chaque soir pris d'assaut par une cohorte de jeunes, et sont placés, depuis quelques semaines, sous haute surveillance policière. Des bousculades indescriptibles autour de ces établissements sont signalées, en particulier à l'approche de l'horaire de fermeture fixé à 21h par arrêté du wali. Les cohues sont identiques à celles qui se forment habituellement pour se procurer un produit de première nécessité frappé de pénurie, ou à la suite d'une annonce d'attribution de logements sociaux. Des jeunes fougueux «assoiffés» arrivent par centaines de plusieurs cités de la ville à bord de motocycles bruyants, envahissent la ruelle et font la queue autour de ces débits de boissons pour «étancher leur soif». Mais, c'est compter sans la présence, en ces endroits, d'agents de sécurité pour rappeler aux patrons les horaires réglementaires de fermeture. «Les clients retardataires», perdant espoir d'être servis, campent quand même autour des lieux, et la file d'attente se prolonge souvent une demi-heure plus tard. Il faut dire aussi que parmi ces consommateurs, certains n'hésitent pas à consommer en pleine rue, sur les trottoirs et d'autres déambulent cannette de bière à la main, défiant les regards désapprobateurs des passants effarouchés. De nouvelles mœurs semblent s'installer avec une nouvelle génération de consommateurs qui bravent les interdits, la discrétion et la pudeur d'autrefois. Souvent, des incidents sont provoqués entre bandes rivales, et l'intervention des forces de l'ordre est nécessaire. Les fauteurs de troubles sont interpellés et embarqués, puis relâchés quelques heures plus tard. Cependant, l'unique établissement qui sert sur place échappe à la réglementation, le patron, introduisant clandestinement des clients après 21h, saisit l'aubaine en taxant fortement le prix des boissons alcoolisées, faisant fi du respect des horaires de fermeture. On murmure que ce débit de boissons bénéficie d'une protection policière particulière de la part de quelques éléments véreux, sinon, fait-on remarquer, il est difficile d'imaginer le laxisme des services concernés pour faire appliquer la réglementation pour tous. Les riverains (restaurateurs, cafetiers et autres commerçants) ont récemment réagi en protestant contre la forte concentration de jeunes dans la soirée à cet endroit, pour réclamer aux pouvoirs publics, à travers une pétition qui circule, leur fermeture ou leur déplacement ailleurs. Mais les autorités locales restent, indique une source sûre, de marbre, face à cette revendication, sans doute pesant les conséquences désastreuses au plan social qu'une telle mesure pourrait entraîner. Le tourisme national et étranger, déjà à l'agonie dans la région, pourrait davantage en pâtir, indique-t-on. La jeunesse pourrait, craigne-t-on encore, se retourner alors vers d'autres substituts encore plus dangereux, comme les stupéfiants ou le mélange d'alcool à base de parfum qui ne pardonne pas.La contrebande sur les boissons alcoolisées est d'ailleurs florissante actuellement à Tindouf, Adrar et El Bayadh, villes approvisionnées par Béchar et d'autres villes du Nord, car privées de la commercialisation légale des alcools, rappellent des voyageurs en provenance de ces régions.