Le père du blufunk, Keziah Jones, a animé le spectacle de clôture du neuvième Festival international du jazz de Constantine (Dimajazz 2011). C'était le premier spectacle de l'artiste britannique en Algérie. Constantine. De notre envoyé spécial Neige de confettis et flammes éclairées, jeudi soir, à la salle Chanderli du palais de la culture Malek Haddad, à la clôture du neuvième Festival international du jazz de Constantine (Dimajazz 2011). La soirée finale est assurée par la star Keziah Jones, le maître du blufunk. Après plus de soixante minutes de spectacle et une douzaine de chansons, le jeune public était toujours debout à réclamer le chanteur-auteur-compositeur britannique. Le retour sur scène ne se fait qu'une fois. Les règles du showbiz sont ce qu'elles sont, l'artiste ne dépasse pas son «minutage» contractuel. «Je suis Nigérian. Lagos, la capitale, ressemble à New York. Il y a beaucoup de monde et il fait très chaud. Ici, à Constantine, c'est plus cool. On se dit bonjour. A Lagos, il y a un je ne sais quoi…il faut avoir une attitude en marchant», a expliqué Keziah Jones en entamant la dernière chanson. Avant, il a interprété une chanson en Yoruba, langue parlée au Nigeria, au Bénin, au Ghana et au Togo. Même s'il vit à Londres, Keziah Jones rappelle, à chaque fois, qu'il appartient à l'ethnie des Yorubas. D'autres artistes de renom, tels que Sade Adu ou Fela Kuti appartiennent à la même ethnie. Accompagné de Richard Stevens à la basse et de Robert Barham à la batterie, Keziah Jones, à la guitare, a choisi des chansons de ses derniers albums tels que Nigerian wood (qui rappelle la célèbre chanson Norwegian wood des Beatles), Rythm is love, Black Orpheus, Liquid sunshine et African craft space. L'artiste passe sans alourdir le pas du blues à la funk et à la pop. Il s'arrête parfois pour un peu de soul. Et, bien sûr, il insiste sur son sytle, blufunk. VOODOO Child «Je vous vois mal assis. Pour la funk, on doit se mettre debout et applaudir», a-t-il lancé à l'adresse d'un nombreux public déjà embarqué dans son bateau ivre. Keziah Jones, qui s'est beaucoup inspiré de Jimi Hendrix, de David Bowie et de Prince, réduit la cadence en interprétant une chanson à la sauce bluesy pure. Il reprend de plus belle en se débarrassant de sa chemise et en exécutant des pas de danse fortement applaudis par les présents sous le roulement mélodique des drums de Robert Barham. L'artiste, qui a la chaleur africaine dans le corps, a enchaîné les morceaux dans lesquels le slap sur guitare est fort présent. C'est une particularité de ce musicien hors pair, celui qui a appris le piano à treize ans et la guitare à seize. Keziah Jones, qui a aujourd'hui 43 ans, joue de la guitare avec la fougue d'un adolescent. Il communique son énergie aux spectateurs. Lui, comme il l'a expliqué lors d'une conférence de presse, jeudi après-midi à l'hôtel Panoramic de Constantine, veut que les jeunes apprennent les fondements du blufunk pour que ce style se perpétue. Keziah Jones voyage actuellement entre Accra, New York, Paris et Lagos pour préparer son prochain album. Cet opus sera le huitième de sa carrière. Le public constantinois a découvert deux extraits de ce nouvel album où l'acoustique aura une grande place. Avant Keziah Jones, le jeune Nadir Leghrib, ou Nadir Nirvana, est passé en ouverture. Il a interprété une dizaine de chansons de son répertoire encore méconnu. Nadir Leghrib, qui est fils d'un père musicien de Annaba, a chanté sur tout : les jeunes, la «harga», les nouveaux riches, l'hypocrisie sociale, l'amour…Son morceau Lesouad Magrouni, qui est une reprise loufoque d'une chanson du patrimoine aurasien, évoque tous les malheurs d'une société livrée au gain facile et aux rapaces de la bureaucratie. «Mon message est la paix», nous a confié le jeune artiste avant le spectacle. Sur le plan musical pur, Nadir Leghrib, qui dit refuser de se cloîtrer dans un genre précis, doit perfectionner son jeu : des mélodies à mieux élaborer et une interprétation à mieux maîtriser. La voix et la guitare sèche ne suffisent pas. La recherche musicale est nécessaire. Nadir Leghrib a du talent. Il peut y arriver. C'est plus que sûr !