Le défi est de taille. La Direction des grandes entreprises (DGE), nouvellement installée, devra assurer la « transparence » dans les déclarations fiscales de ce qu'on appelle les « gros bonnets ». Cette nouvelle structure promet, d'après les dires de Mohamed Abdou Bouderbala, directeur général des impôts, de donner un tour de vis dans le secteur de la fiscalité. Une démarche d'autant plus importante que le volume des dettes fiscales reste encore conséquent. 600 milliards de dinars restent à recouvrer par l'administration des impôts. Un montant qui avoisine la part annuelle des recettes fiscales hors hydrocarbures, de l'ordre, selon le premier responsable des impôts, de 732 milliards de dinars pour l'année 2005. « Il faut savoir, soutient M. Bouderbala, que ce montant de la dette représente une accumulation de nombreuses années. A chaque fois qu'on récupère une partie, d'autres créances s'ajoutent au montant. » Au cours d'une journée d'information tenue hier au ministère des Finances destinée aux patrons dont les entreprises pèsent plus de 100 millions de dinars, le directeur général des impôts, accompagné du directeur de la DGE, a, en effet, fait état des nouvelles obligations auxquelles doivent se soumettre les grandes entreprises. Celles-ci doivent désormais traiter directement avec la Direction des grandes entreprises. « Il y aura ainsi un seul immeuble, un même dossier, un même interlocuteur et un même suivi », a souligné hier M. Bouderbala. Il enchaînera en disant qu'il est important d'établir des liens de partenariat entre l'administration fiscale et l'entreprise de manière à ce que les opérations soient facilitées. La gestion financière se fera désormais, a-t-il précisé, selon le poids de l'entreprise. Il a été recensé, pour l'heure, près de 3400 entreprises éligibles à la DGE à l'horizon 2007. Il s'agit des sociétés réalisant un chiffre d'affaires égal ou supérieur à 100 millions de dinars, les groupes étrangers ainsi que les entreprises pétrolières. La transparence est indispensable Leur intégration dans le nouveau système fiscal se déroulera progressivement. Dans la mesure où Alger et ses environs comptent le plus grand nombre de sociétés (un tiers de la fiscalité), la DGE s'intéressera d'abord au lot des 869 entreprises qui y sont installées. Ce premier lot d'entreprises devant être intégrées à la DGE est composé d'entités économiques situées dans les wilayas d'Alger, Blida, Tipaza, Boumerdès, Tizi Ouzou et enfin Ouargla qui, à elle seule, compte 125 entreprises pétrolières et parapétrolières. Les entreprises pétrolières, au nombre total de 265 entreprises, sont d'ailleurs automatiquement insérées dès le lancement de la DGE prévu le 3 janvier prochain. Par secteurs d'activité, le premier lot d'entreprises concernées est constitué à 25% de sociétés relevant du secteur industriel, 24% du secteur parapétrolier, 20% du commerce, 19% du BTP, 8% du secteur pétrolier et 4% du secteur des prestations de services. Par wilaya, ces entreprises sont installées surtout à Alger (608 sociétés), 125 à Ouargla , 62 à Blida , 31 à Boumerdès, 21 à Tipaza et 18 à Tizi Ouzou. Une fois achevée l'opération de rattachement de l'ensemble des entreprises éligibles à la DGE, il est prévu la mise en place de nouveaux critères d'éligibilité, comme le montant du capital social. Pour assurer la transparence, le directeur des impôts compte sur la prochaine mise en place des « cartes magnétiques » qui aideront, selon lui, à détecter les fraudeurs. M. Bouderbala a, à de nombreuses reprises, exhorté les chefs d'entreprise à ce point. « Pour contracter un mariage heureux, la transparence est indispensable », résume-t-il. La nouveauté de cette direction réside également dans le fait qu'elle comprend cinq sous-directions de la fiscalité qui devront se charger des hydrocarbures, du recouvrement, de la gestion, du contrôle fiscal ainsi que des contentieux. Le directeur de la DGE, Kouider Benhamed Djilali, insiste sur le fait que cette nouvelle structure permettra « un traitement rapide des créances des entreprises, un assouplissement des modalités de paiement et un remboursement des excédents en temps réel ». Avant d'adhérer à la DGE, il est préférable, souligne-t-on, que les entreprises règlent d'abord leurs contentieux. « 95% des contentieux des grandes entreprises ont été réglés », souligne à ce propos M. Bouderbala. Les entreprises qui enregistrent un chiffre d'affaires inférieur à 100 millions de dinars seront orientées vers les centres des impôts (il en existe 70 à travers le territoire national). Les grandes entreprises, dont le chiffre d'affaires a été revu à la baisse, doivent faire preuve de vigilance. « Si une entreprise qui faisait partie de la DGE enregistre, pour une raison ou une autre, un chiffre d'affaires inférieur à 100 millions de dinars, un contrôle sera immédiatement déclenché », avertit le DG des impôts. Pour M. Bouderbala, la mise en place de cette structure n'est qu'une étape d'un programme de réforme de longue haleine. « Nous n'avons pas tellement peur des grandes entreprises », confie-t-il avant de conclure : « Le gros travail consistera en la mise en place des centres des impôts pour les PME-PMI. »