Après plusieurs semaines de tractations, la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, a pris la semaine dernière la tête du Fonds monétaire international (FMI) en remplacement à Dominique Strauss Kahn après que les 24 membres du conseil d'administration du FMI aient porté leur choix sur elle. Dans la dernière ligne droite, Christine Lagarde a coiffé le Mexicain Agustin Carstens, forte d'un soutien de dernière minute, celui de la Chine. Aussitôt élu, Mme Lagarde a été appelée par la Chine à respecter ses engagements. Durant sa campagne, elle avait rendu visite aux pays émergents leur promettant de défendre leurs intérêts, notamment en augmentant leurs quotes-parts, c'est-à-dire leur nombre de voix et donc leur poids dans les décisions. C'est sur cette base que la Chine a appelé à ce que les pays émergents, dont l'Inde, le Brésil, la Russie et elle-même, obtiennent plus de poids au sein de l'institution internationale, en affirmant espérer que le FMI «continuera sa réforme et jouera un rôle actif dans la stabilisation de l'économie mondiale, tout en accroissant la représentativité des marchés émergents et des pays en développement dans la gouvernance du FMI». La Banque populaire de Chine (BPC) a publié un communiqué dans lequel elle a indiqué que les «économies à forte croissance d'Asie» espèrent que la nouvelle directrice sera «celle qui entendra enfin les demandes faites de longue date pour donner plus de pouvoir aux marchés émergents». La presse chinoise déplorait que les droits de vote de l'Europe, des Etats-Unis et du Japon représentaient encore près de cinq fois ceux de la Chine, de l'Inde, du Brésil et de la Russie réunis. Avec leurs grandes quotes-parts, les 27 Etats membres de l'Union européenne (32%) et les Etats-Unis (17%) dominent le FMI bien que l'ordre mondial s'articule vers l'Asie. Lors de sa récente tournée de campagne en Asie, Mme Lagarde a reconnu que des pays comme la Chine et l'Inde méritent un droit de vote plus important au FMI pouvant refléter leur puissance économique croissante. Dans sa lettre de motivation, adressée au conseil d'administration, elle a même écrit que «le FMI doit continuer d'agir de manière plus réactive, impartiale et équilibrée (…) pour répondre au mieux aux besoins de l'ensemble de ses pays membres». Elle s'est engagée à «adapter sans relâche la représentation des pays au sein du FMI (…) à l'évolution des réalités économiques». Mme Lagarde a également promis d'œuvrer dans la continuité de son prédécesseur Dominique Strauss-Kahn et pour «un libéralisme tempéré». Suivant les points énoncés dans sa lettre de motivation et dont la presse française s'est faite l'écho, la nouvelle patronne du FMI s'est fixé comme priorité de relancer l'économie mondiale. Elle notait avant son élection que «le FMI a beaucoup à faire avec une reprise mondiale inégale, des déséquilibres mondiaux qui s'aggravent de nouveau, le risque de déstabilisation lié aux flux de capitaux, le chômage élevé, la hausse de l'inflation et des dossiers difficiles dans certains pays». La priorité des priorités sera, bien sûr, la situation en Grèce où elle a déjà appelé la droite à accepter le nouveau plan d'austérité du gouvernement socialiste, imposé par l'Union européenne et le FMI. La nouvelle patronne envisage également d'accroître les prérogatives du Fonds en matière de surveillance des marchés financiers. «Au-delà de sa mission fondamentale, qui consiste à garantir la stabilité des taux de change, le FMI doit mieux intégrer les questions relatives au secteur financier dans ses travaux de surveillance, en coopérant avec le Conseil de stabilité financière et d'autres organes concernés», avait-t-elle annoncé dans sa lettre.