Parmi les femmes qui ont défrayé la chronique, il y avait la dame à la Polo rouge. Il y a maintenant la vieille à la BMW rouge. Fatmi Djamaâ, anonyme dame de 65 ans habitant les environs de Saïda, vient de gagner une BMW rouge grâce à sa participation heureuse au jeu des bouchons de Coca-Cola. A travers cette méritoire victoire de femme, c'est toute l'Algérie qui est ici dépeinte ; d'un côté Coca-Cola, firme américaine, fait gagner des BMW à de vieilles femmes au foyer, et de l'autre les islamistes, produit hélas authentiquement local, sombrent dans l'hystérie pour une petite loi sur la suppression de la polygamie. Si l'avancée historique s'arrête là puisque Fatmi Djamaâ avoue ne pas avoir le permis et va évidemment donner sa voiture aux garçons de la famille (encore des hommes), il est à noter que jamais l'Algérie n'a recelé autant de contradictions et de boissons gazeuses. Au dernier relevé, il y aurait 16 millions de femmes et près de 400 fabricants de limonade, dont la vieille à la BMW rouge et Hamoud Boualem, dont on avait prédit la fin mais toujours dans le peloton de tête, comme pour montrer que les Algériens n'ont pas peur de la mondialisation. Leur seule inquiétude, qu'ils soient hommes ou femmes, est le coût de la vie. Dans l'Algérie des prix fous, pour avoir une voiture, il faut donc boire du Coca. Pour avoir un appartement, c'est le même principe, il faut lire Amenphis, la revue d'architecture de M'hamed Sahraoui, qui offre un appartement de 500 millions à ses lecteurs par tirage au sort. Est-ce un progrès ? Peut-être. Avant, quand un Algérien avait de la chance, il pouvait au mieux avoir (en le payant) un réfrigérateur avec un bon de la Sonacat et la gratitude symbolique de Houari Boumediène. Aujourd'hui, s'il maîtrise le hasard, il peut se loger dans un très bel appartement et conduire une très belle voiture.