Une centaine de photographes, professionnels ou amateurs, liés par la même passion vibrante pour cet art se sont rencontrés du 15 au 18 juin dernier à Guelma, à l'occasion du 3e Salon de printemps de la photographie contemporaine. Cinq lauréats ont été distingués pour leurs travaux par un jury de professionnels. La prochaine étape est la création d'une fédération de photographes, projet longuement débattu au cours du Salon. Découverte. Hadeel Ramly. Prix de la meilleure participation féminine : Une autre image de la Palestine Née en Jordanie, d'origine palestinienne, Hadeel a toujours grandi avec le désir ardent de connaître sa patrie et de se faire sa propre idée de la question palestinienne. Après plusieurs années en Italie, la jeune fille décide, à l'aube de ses 18 ans, d'aller poursuivre ses études à Ghaza afin de renouer avec sa terre natale. Après une licence en journalisme à l'université de Ghaza, elle est actuellement photoreporter au sein de la Fondation arabe pour l'image. C'est d'ailleurs dans l'exercice de sa profession que ses photos ont été prises. Elle désire «montrer une autre image de la Palestine que celle véhiculée par les médias, et mettre l'accent sur l'action de la femme palestinienne». Actuellement, la jeune fille de 23 ans prépare un beau livre, Living in Gaza, autour de son expérience personnelle de ces quatre dernières années et souhaite contribuer à véhiculer «une image réelle de la Palestine».
Mohamed Kaouche. Prix noir et blanc des participants : Fasciné par Capa ou Natchway
C'est en s'aventurant dans la librairie de son père que Mohamed, fasciné par «les photos des reporters de guerre de Robert Capa, Patrick Robert ou James Natchway», a trouvé sa vocation. A 20 ans, il décide d'en faire son métier, bien que pour lui, ce soit «avant tout un art». Aux frontières de la photographie de presse et de la photographie artistique, Mohamed précise que chacun de ces genres est «destiné à un public différent, bien que tous les deux soient faits pour le plaisir des yeux». Sa photo curieuse et expressive a été prise le 22 janvier 2011 lors des dernières manifestations de protestation à Alger, au siège du RCD. Un manifestant, fermement empoigné par deux agents, fait face à une vague de policiers. «La chance y est pour beaucoup, j'ai été au bon endroit au bon moment», explique-t-il. Ce prix est pour ce jeune photographe le second de l'année. «ça procure une confiance en soi et une satisfaction personnelle», confie-t-il.
Said Ait Ali. Prix couleur des participants : L'œil artistique du photographe sportif Lorsque Saïd s'amusait avec le vieil appareil photo argentique de son père, il n'imaginait sans doute pas qu'un jour il en ferait un métier et serait récompensé pour ses créations. Journaliste et photographe au quotidien sportif Compétition, il est à l'aise derrière son objectif, aussi bien sur les terrains de foot qu'à Tamanrasset où il a pris la photo qui a remporté le vote des participants. On pourrait penser que la teinte brunâtre de la photo serait le résultat d'un traitement artificiel, mais il s'agit bien d'une photographie couleur. Le personnage recouvert de poussière se fondrait presque dans le paysage si ce n'est le mégot qu'il tient dans la main. «Je peux dire que je préfère la photo d'art, mais malheureusement, il est difficile d'en vivre. Du moins en Algérie», déclare-t-il. Il trouve toutefois la frontière poreuse entre photographie de presse et photographie artistique, puisqu'«on peut se permettre de faire de belles photos. Souvent, on arrive à voir des photoreporters qui exposent des photos d'art prises pendant leur travail», même si, sur le terrain, «on n'a pas beaucoup de temps pour bien étudier sa composition». C'est bien dans le registre de la photographie artistique que Saïd s'est distingué dans la catégorie meilleure photographie couleur. «Je suis particulièrement heureux de remporter un prix dans cette catégorie, car le vote a été soumis aux participants du Salon. Je me dis que c'est une reconnaissance.»
Besma Khalfa. Prix du concours : Un penchant pour la photo de rue
Afin de participer au Salon, Besma a fait «un aller-retour express» à Ghardaïa, «l'image de l'Algérie profonde, la diversité des mœurs et coutumes de nos régions», précise-t-elle. Pari gagné puisque la photo a trouvé son chemin vers le cœur du jury. Besma est infographe et webmaster. Celle qui raconte s'être toujours amusée à «prendre en photo sa petite famille», s'est tournée vers la photographie artistique avec le souhait d'en faire un jour son métier. Du haut de ses 25 ans, la jeune photographe a conscience des difficultés de cette profession, surtout lorsqu'une jolie jeune fille est derrière l'objectif et que celle-ci a un grand penchant pour la photographie de rue. Mais déterminée, elle considère que c'est «un vrai challenge quand on est aussi passionné par cet art». C'est à travers le Club algérien de la photographie qu'elle a entendu parler du Salon. «Avant la découverte du club, je ne pensais pas qu'il y avait autant de mordus de photographie ! Et grâce justement à ce club et à l'association Lumière, de Guelma, je pense avoir trouvé mon chemin.» Très surprise de s'être démarquée avec son travail, «vu la qualité et la diversité des œuvres exposées», Besma estime que celui-ci lui apporte beaucoup. De «la détermination pour en faire mon métier. Car si des jurés aussi expérimentés et doués ont cru en mon talent, je ne peux que croire en moi et continuer sur ma lancée.»
Khaled Sahou. Prix spécial du jury : Le concept derrière la photo
Les photos que Khaled a exposées ont quelque chose de déroutant. Celle qui aura le plus attiré l'attention est sans doute celle qu'il appelle «Gravity Rock». A 20 ans, Khaled est étudiant en informatique. Passionné d'arts graphiques, il apprend en autodidacte à manipuler la 2D et la 3D, et commence à exercer en tant qu'infographe. En 2010, il décide d'investir dans un appareil photo numérique reflex afin de développer son grand penchant pour la photographie. «J'aime bien les photos conceptuelles où le photographe doit mettre en place les éléments qui composent sa photo, de sorte qu'elle ait un sens ou une idée à faire parvenir à ceux qui la regardent», explique-t-il. Même s'il s'épanouit à travers le travail créatif et de recherche qu'exige ce genre de photo, il désire aussi s'essayer au photojournalisme pour ce que ce métier apporte. Pour «Gravity Rock», Khaled a eu recours au système D. «J'ai collé des objets contre le sol, un tapis contre le mur, puis réglé mon appareil sur un trépied en plongée.» C'est d'ailleurs lui-même qui prend la pose avec sa guitare, une autre passion. Il garde un très bon souvenir du Salon qu'il trouve «très instructif», particulièrement pour les rencontres et les échanges. Le prix qu'il a reçu l'encourage à «faire plus d'effort et essayer de concrétiser mes idées artistiques».