A 63 ans, le Festival lyrique d'Aix-en- Provence se porte comme un charme et, mieux encore, donne l'impression de rajeunir. Les gradins sont pleins et les objectifs financiers assurés. Vogue la musique ! Aix-en-Provence. De notre envoyé spécial Dans cette ville d'art, chaque été semble renaître aux tableaux du vénéré maître des lieux, Cézanne, et vibrer au génie de Picasso qui résida jusqu'à sa mort dans le château tout proche de Vauvenargues. Tout semble fluide en ce pays provençal où les touristes, eux-mêmes, paraissent avoir appris la bonhomie historique des lieux aux multiples trésors cachés. Nombreux en cette saison estivale, ils répondent présents à la grande fête musicale, emplissant les gradins, assurant du coup les comptes positifs du festival. Le rendez-vous ne peut que rester pimpant dans cette ambiance doucereuse, îlot de bonheur dans un monde en souffrance. Cette cure de jouvence ne doit, cependant, rien au hasard. Ces dernières années, les responsables de cette éminente rencontre musicale font tout pour lui donner un coup de fraîcheur. D'abord, en créant une académie européenne de musique. Des compositeurs émérites viennent y encadrer des artistes en formation. Ils seront peut-être les stars de demain dans la programmation. En tout cas, cela permet au festival de brasser beaucoup d'inspiration juvénile. L'ART EN MOUVEMENT Si depuis 1948 le festival doit ses lettres de noblesse à des mises en scène d'opéras les plus classiques, il s'ouvre de plus en plus à des œuvres plus modernes. Le directeur, Bernard Foccroule, nous a confié que «l'opéra réunit toutes les disciplines. Etre à la fois sur la musique, le texte, le théâtre, la dimension visuelle, dans certains cas sur la vidéo, sur le cinéma, cela parle à tout le monde. L'opéra est un art qui n'a pas dit son dernier mot, mais il faut pour cela qu'il vive». Cette année, c'est Le Nez de Dimitri Chostakovitch (1906-1975) qui prouve la pérennité d'un genre inépuisable avec un succès enthousiaste. Une autre création récente intrigue : Thanks to my eyes du compositeur italo-suisse, Oscar Bianchi. L'an prochain, Written on skin de Georges Benjamin sera sur scène. Signe de l'art en mouvement, le directeur a indiqué que l'œuvre était en cours d'écriture : «Nous attachons pour cela beaucoup d'importance à la création d'œuvres contemporaines. L'avenir est de donner la préséance aux artistes vivants.» Bien sûr, c'est pour le classique indémodable, plus facile d'accès, qu'on accourt du monde entier. Opéras, symphonies, concertos et autres œuvres plus intimes forment l'ossature de concerts placés sous la houlette du London Symphony Orchestra, dirigé par Sir Colin Davis. LA TRAVIATA EN PLEIN… AIR Au plan opératique, dans la cour somptueuse de l'archevêché, transformée en théâtre de plein air, La Traviata de Guiseppe Verdi n'a pas démenti son succès depuis sa création, en 1853, à Venise. Ce concentré d'airs connus, dont s'est nourrie la publicité, donne toujours autant d'émotion. A Aix, nous avons pu voir cet opéra dans la mise en scène moderne et efficace de Jean-François Sivadier. Pour lui, ce «qui rend l'œuvre à ce point universelle et intemporelle, c'est ce combat entre notre résignation à la mort, et notre aspiration à la vie». Pour lui, «cette chose-là, d'une certaine manière, est partagée par tout le monde». Aix le prouve aisément. *Pour ceux qui disposent d'Internet à haut débit, le Festival d'Aix (du 5 au 25 juillet) est visible pendant plusieurs semaines sur arte.fr, ou liveweb.arte.tv, ainsi que pour certains spectacles par satellite sur Arte, Mezzo, et France 2.