Les pays arabes et particulièrement les intellectuels arabes observent un silence aussi coupable qu'insupportable à l'égard des crimes commis quotidiennement par le régime de Bachar Al Assad. A l'exception des marches et des sit-in de protestation organisés par deux fois au siège de l'ambassade de Syrie à Alger par les militants des droits de l'homme et quelques leaders de partis politiques, aucune capitale arabe n'a manifesté sa solidarité aux militants de la démocratie en Syrie. Pas même celles qui viennent de sortir du joug de la dictature. Les réactions se sont multipliées, hier, dans le monde pour condamner l'intervention de l'armée syrienne dans les villes frondeuses. En tout, les redoutables forces de sécurité syriennes ont tué 139 personnes, dont une centaine dans la seule localité de Hama. Première à réagir, l'Union européenne n'a pas hésité à qualifier de «massacre» cette offensive militaire présentée par le régime de Bachar Al Assad comme une «opération de maintien de l'ordre et de lutte antiterroriste». Le président américain Barack Obama s'est dit, quant à lui, «horrifié par l'usage qu'a fait le gouvernement syrien de la violence et de la brutalité contre son propre peuple». «Les informations en provenance de Hama sont épouvantables et montrent le vrai caractère du régime syrien», a dit le président américain. De leur côté, l'Italie et l'Allemagne ont jugé utile, vu l'évolution de la situation, de réclamer une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU. Face à autant de morts, la chef de la diplomatie de l'UE, Catherine Ashton, a souhaité aussi que le Conseil de sécurité de l'ONU agisse sans tarder pour mettre fin aux violences en Syrie. «Il est temps pour le Conseil de sécurité de prendre une position claire sur la nécessité de mettre fin à la violence», a-t-elle affirmé dans un communiqué. Le souhait de la responsable de la diplomatie européenne a été très vite entendu puisqu'un porte-parole de la présidence du Conseil a indiqué que le Conseil de sécurité de l'ONU allait tenir le jour même des consultations à huis clos sur la crise en Syrie. Celles-ci devaient avoir lieu hier à 21h GMT. Dans le but de mettre d'ores et déjà la pression sur le pouvoir syrien, Mme Ashton a annoncé la décision de l'UE de sanctionner cinq nouveaux proches du président syrien Bachar Al Assad. Les noms de ces cinq individus doivent être publiés mardi dans le Journal officiel de l'UE. Il s'agit du quatrième train de sanctions de l'UE à l'encontre de caciques du régime syrien. Le président syrien, lui-même, ainsi que des sociétés liées au pouvoir et des responsables des Gardiens de la révolution iraniens, accusés d'aider le régime syrien à mater les contestataires, ont déjà été sanctionnés. L'annonce a dû certainement faire plaisir au chef de la diplomatie britannique, William Hague, qui avait demandé quelques heures plutôt «davantage de pression internationale» sur la Syrie. Ce qui étonne le plus, c'est le silence observé par les pays arabes et particulièrement par les intellectuels arabes à l'égard de crimes commis quotidiennement par le régime de Bachar Al Assad. A l'exception des marches, des sit-in de protestation organisés deux fois au siège de l'ambassade de Syrie à Alger par les militants des droits de l'homme et quelques leaders de partis politiques, aucune capitale arabe n'a manifesté sa solidarité aux militants de la démocratie en Syrie. Cela pas même celles qui viennent de sortir du joug de la dictature. Vu leur caractère autoritaire, il ne serait pas étonnant d'apprendre demain que des pays arabe ont adressé des messages de soutien au régime de Bachar Al Assad ou, pis encore, lui ont proposé de l'aider à réprimer la population syrienne. Après tout, aucun pouvoir n'a intérêt à ce que la région se démocratise.
Al Assad nargue le monde Bien que tout le monde sait qu'elle n'est qu'une coquille vide à la solde de l'Arabie Saoudite et des monarchie du Golfe, la Ligue arabe n'a également pas jugé utile de réagir (ne serait-ce par un communiqué) au drame qui s'est produit dimanche à Hama. Son mutisme contraste avec l'incroyable célérité avec laquelle ses membres ont appelé la communauté internationale à intervenir militairement en Libye et donné leur quitus pour la répression, par les forces armées saoudiennes, des populations chiites du Bahreïn. De nombreux spécialistes disent que le malheur des pays arabes et musulmans vient de la trahison des élites qui, au lieu de servir d'éclaireurs au peuple, ont préféré se «vendre» aux pouvoirs en place et servir les dictatures. Même la Russie – qui a pourtant des intérêts financiers et géopolitiques importants avec Damas – n'a pas osé adopter une telle complaisance à l'égard du régime syrien. Pas plus loin qu'hier, Moscou a appelé à la fin de la «répression» et fait part de sa «sérieuse inquiétude» suite aux informations faisant état de nombreuses victimes à Hama. «Nous appelons le gouvernement de Syrie et l'opposition à faire preuve d'un maximum de retenue et à renoncer aux provocations et à la répression», a indiqué le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué rendu public durant la journée. «Le recours à la force, tant contre des civils que contre des représentants des structures étatiques, est inacceptable et doit cesser», a insisté le ministère. Malgré les fortes condamnations de la communauté internationale, les assassinats de civils se sont poursuivis hier. Selon des militants des droits de l'homme, deux personnes ont encore été tuées par l'armée à Hama et une autre à El Boukamal, une petite localité située à l'est du pays. Comme pour narguer ses détracteurs et surtout que la pression internationale ne l'effraie pas, le président Bachar Al Assad a félicité hier l'armée «patriotique» syrienne, symbole de «l'orgueil» national. «Je salue chaque soldat et le félicite à l'occasion du 66e anniversaire de la création de l'armée arabe syrienne (...) qui défend ses droits face aux plans agressifs qui nous visent aujourd'hui et demain», a affirmé le président lors d'une allocution. Le message est clair : Bachar Al Assad, comme son sanguinaire de père, est prêt à tout pour rester au pouvoir et garder en vie le régime qu'il a hérité. Quitte à raser des villes entières. A rappeler que depuis le début de la révolte, la répression a fait, selon les ONG de défense des droits de l'homme, quelque 2000 morts et près de 3000 disparus.