La Compagnie algérienne de banque (CA Bank) vient de disparaître du secteur bancaire algérien, véritable triangle des Bermudes pour tout banquier algérien qui a le malheur de s'y aventurer. La décision que vient de prendre la Banque d'Algérie n'affectera évidement en rien le fonctionnement du système bancaire, à plus de 95% aux mains des banques publiques, mais par sa symbolique. Cette énième faillite portera un coup dur de plus aux quelques banques privées déjà suffisamment ébranlées par le sort réservé aux banques El Khalifa, BCIA et AIB. A travers toutes ces affaires, l'Algérie offre aux hommes d'affaires algériens et étrangers la détestable image d'un pays qui ne veut absolument pas que la concurrence interbancaire s'installe, à moins qu'elle reste cantonnée dans le seul cercle fermé des banques publiques. C'est ainsi que la poignée de banques privées qui activent depuis l'ouverture de 1998 n'a pu accaparer à ce jour qu'environ 3% de l'activité du crédit, constituée pour l'essentiel de prêts à la consommation et à l'importation. Leur montée progressive en activité a souvent été empêchée par les autorités politiques algériennes qui continuaient volontairement à privilégier les banques publiques, auxquelles elles réservaient un traitement de faveur en dépit de la législation prônant officiellement l'avènement de la concurrence interbancaire. En à peine 15 ans, les banques publiques bénéficieront de pas moins de 25 milliards de dollars pour combler les créances irrécouvrables laissées par les entreprises publiques et autres clients insolvables. C'est évidemment un traitement de faveur dont n'osent même pas espérer bénéficier un jour les banques privées qui sont liquidées à la moindre défaillance en dépit de leur jeune âge. Une instruction du chef du gouvernement, sans doute inspirée de l'affaire El Khalifa, est de surcroît venue exacerber les déboires des banques privées en interdisant carrément aux opérateurs publics de déposer leurs avoirs à leur niveau. Cette circulaire explique en grande partie leur régression au cours de ces deux dernières années. Le coup de grâce sera certainement donné par la toute récente décision du Conseil de la monnaie et du crédit fixant leur capital social à 2,5 milliards de dinars, soit cinq fois plus que le niveau minimal actuel. Le délai de mise en œuvre de la décision est fixé au 31 mars prochain. Une décision que n'auront certainement pas de difficulté à appliquer les banques privées étrangères du fait de la puissance financière des groupes auxquelles elles appartiennent, mais qui posera problème au peu de banques privées algériennes qui ont réussi à survivre en dépit de toutes les vicissitudes. Ces banques n'auront d'autres choix que de trouver les capitaux requis chez des hommes d'affaires qui ne seront certainement pas nombreux à s'intéresser en raison des conditions peu favorables d'exercice de l'activité bancaire privée en Algérie. L'autre possibilité est que ces banques fassent fusion, mais il faudrait dans ce cas pas moins de cinq banques privées pour constituer une seule banque au capital de 2, 5 milliards, tel que nouvellement exigé par la Banque d'Algérie. C'est pourquoi, d'aucuns assimilent déjà cette décision à un coup de grâce au détriment des dernières banques privées.