Le ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS) est en train de plancher sur la situation financière des clubs de football. Il veut tout savoir sur les budgets alloués aux clubs par le biais des fonds de wilaya et autres sources ces trois dernières années. A cet effet, les 48 directions de la jeunesse et des sports (DJS) ont été instruites, début juillet dernier, de transmettre l'état complet de ces financements. Les premiers chiffres commencent à tomber au ministère ; ils émanent de Béjaïa, Bordj Bou Arréridj, Sétif, Blida, Chlef, Batna, Aïn Témouchent, Biskra… en attendant le reste. Pour rappel, ces subventions ne concernent que les fonds de wilaya (DJS, APC, APW, entreprises locales publiques et privées). Premier constat : le niveau des subventions allouées diffère d'une wilaya à une autre. Pourtant, on est face aux mêmes institutions de la République. Le pouvoir local est très généreux ici et très chiche ailleurs. Les cas les plus édifiants qui illustrent cette (amère) réalité sont ceux vécus, par exemple, par les deux clubs de Batna, le CAB et le MSPB, qui ont bénéficié respectivement de 7 et 8 millions de dinars pour les exercices cumulés 2009 et 2010. Ces «miettes» n'ont aucun rapport avec le jackpot qu'a touché l'ES Sétif pour l'exercice 2009-2010 et ce qui est programmé pour 2011. Soit la bagatelle de 61 milliards de centimes. A titre indicatif, selon des informations puisées de bonnes sources, l'ESS a encaissé 9,880 milliards de centimes au titre de la saison 2009. Durant l'exercice suivant, le club sétifien a bénéficié de 12,480 milliards de centimes. Pour l'année en cours (2011) il est prévu qu'il reçoive 38,710 milliards de centimes. A priori et en attendant les autres chiffres, Sétif semble être le club algérien le mieux logé en matière de subventions. Beaucoup de clubs de différentes régions du pays n'ont pas cette chance. Celle de compter sur la «générosité» du pouvoir local. Alors que l'exécutif de la wilaya de Sétif ne refuse rien à son équipe de foot, ailleurs des clubs meurent dans l'indifférence des édiles locaux pour qui le football n'est pas une préoccupation majeure par rapport, il est vrai, aux autres besoins de la collectivité. C'est la politisation du football qui est à l'origine de ces écarts. Comparée à l'ESS, la JS Kabylie a toutes les raisons d'être mécontente du traitement que lui réservent les autorités de la ville et de la wilaya en matière de subventions. Sur la même période que pour l'ESS (2009, 2010 et 2011), la JSK a eu droit à une seule subvention, en 2010, de l'ordre d'un milliard de centimes sur le budget primitif de l'exercice. En 2009 et 2011, le club n'a pas perçu un dinar du fonds de wilaya. Sur le même chapitre, il y a lieu de noter que la JSM Béjaïa a bénéficié de 900 millions de centimes en 2009 et d'un milliard en 2010. L'USM Annaba (reléguée en Ligue 2) a reçu 1,550 milliard de centimes en 2009 et 3 milliards en 2010. L'ASO Chlef, champion d'Algérie 2010-2011, a reçu une enveloppe de 2,950 milliards de centimes en 2009 et de 1,2 milliard en 2010. L'US Biskra et le CR Témouchent (pensionnaires de Ligue 2) ont bénéficié, respectivement, de 750 millions de centimes (USB) et 500 millions de centimes (CRT) en 2009 et 2,950 milliards de centimes et 500 millions de centimes en 2010. En attendant de connaître les chiffres et le montant de l'ensemble des subventions provenant du fonds de wilaya, il paraît urgent, pour ne pas dire vital, de revoir totalement les mécanismes qui président au versement des subventions, d'autant plus qu'il s'agit, partout, d'argent public. Il n'est pas normal du tout que cette allocation soit laissée à l'absolue discrétion du wali ou du président de l'APC. Il faut mettre le football définitivement à l'abri de cette politique qui ne sert en fin de compte que les étroits intérêts personnels de ceux qui préconisent et défendent ce choix. Tant que les pouvoirs publics n'exerceront pas leur droit fondamental de contrôle des subsides et subventions alloués aux clubs, la situation ne changera pas. Pis, elle empirera. Le dernier fait survenu ces dernières semaines conforte cette crainte. Les pouvoirs publics avaient décidé d'octroyer un milliard de centimes à chaque club pour l'achat d'un bus de haut standing. Ce budget était chapitré et ne pouvait servir qu'à l'achat de ce véhicule. On apprend que des clubs de la Ligue 1 ont consommé cette rondelette somme en versement de primes et salaires aux joueurs. Le drame est que l'ordonnateur est resté impuissant devant cet acte. Les 25 millions de dinars qui vont bientôt tomber dans l'escarcelle des clubs serviront, sûrement, à autre chose que ce à quoi ils étaient destinés. Est-ce le début de la fin de l'expérience du professionnalisme en Algérie ?