Signe de mutations sociales, d'une communication verbale, qui ne fait plus émules, ou de comportements dictés par les contraintes et la cadence d'une vie urbaine faite de stress et d'individualisme, l'on ne sait pas trop pourquoi les familles à Souk Ahras ne se rendent plus visite pendant le mois de Ramadhan. Cette habitude était pourtant bien ancrée dans les mœurs des grandes familles qui mettaient à profit les longues nuits du mois sacré pour s'inviter autour d'un thé. Pas besoin d'un prétexte pour transformer le patio d'autrefois en lieu de fête où les rires des enfants, tout heureux de jouer, se mêlent au brouhaha des adultes qui trouvent soulagement après une longue journée de labeur et de jeûne dans ce qui est convenu d'appeler chez les psychologues: la thérapie de groupe. L'on discutait aussi de tout ce qui pouvait intéresser les frères et les cousins dans l'entente et la convivialité, et c'est souvent le plus âgé qui oriente les discussions ou les affine. Le rituel et le festif y étaient. Autres temps, autres mœurs: les soirées ramadhanesques à Souk Ahras se résument, actuellement, en une suite de nuits fastidieuses faites de mousalsalate et, dans le meilleur des cas, d'un interminable va et vient vers les places publiques sinon une sortie en voiture sans objectif.