Le dernier roman d'Amine Zaoui, Le chamelier des femmes et des boucs, paru aux éditions El Ikhtilef, s'est complètement vendu au dernier Salon international du livre d'Alger (SILA).Ses derniers romans, Festin de mensonges et La Chambre de la vierge impure (parus aux éditions Barzakh) et son recueil de nouvelles, Irruption d'une chair dormante, publié par les éditions El Beyt, ont connu un succès de librairie. Rencontré à la faveur d'une séance de vente-dédicace au dernier Sila, l'auteur dénonce, dans cet entretien son exclusion des débats du salon. -Amine Zaoui n'a pas été invité à animer une conférence ou un débat au Salon international du livre d'Alger, s'agit-il d'un boycott ? Pour la troisième fois consécutive, je suis exclu de ce salon du livre. Pourtant, en 2010, j'ai fait sortir deux romans, un en arabe, un autre en français. Et cette année, je viens de publier un roman en arabe chez Ikhtilef Le chamelier des femmes et des boucs. Je sens que je suis sur une liste noire. Je ne sais pas qui l'a établie. Je suis triste et en colère. Ce comportement d'exclusion n'a rien de culturel, d'artistique ou de politique. Le Salon du livre devrait être un espace d'échanges, de tolérance, de diversité d'idées, de personnes et de sensibilités. -N'avez-vous pas trouvé une explication à cette mise à l'écart ? Peut-être que les organisateurs du Salon du livre pensent que j'ai un malentendu avec Mme la ministre de la Culture, cela fait trois ans que j'ai quitté la direction de la Bibliothèque nationale. J'ajoute que je ne suis pas invité par les directions de culture des wilayas. Idem pour les maisons de culture et des théâtres au niveau national. C'est un embargo qui dure et qui commence à peser. Il y a une sorte de peur et de terreur dans les institutions culturelles dès qu'on prononce le nom d'Amine Zaoui. Dommage. -Pourquoi Amine Zaoui fait-il peur ? Sincèrement, je ne sais pas. Je n'ai jamais changé de façon d'écrire. Lorsque j'étais à la direction de la Bibliothèque nationale, j'écrivais avec la même sensibilité et la même vision. Et je continue toujours. Malheureusement, un lobby est en train de se constituer autour du Salon du livre et qui le handicape en marginalisant les intellectuels. -Et que nous raconte Le Chamelier des femmes et des boucs, titre de votre dernier roman paru en langue arabe? C'est l'histoire de trois sœurs chrétiennes qui embrassent l'Islam dans un village en Algérie. Un journal annonce un jour que ces trois femmes veulent se marier avec des Algériens. C'est alors la folie dans le village et dans le pays. Même l'imam se met de la partie et veut se marier avec une ou deux de ces femmes. En somme, le roman tente de montrer les aspects commerciaux qui peuvent être liés à la religion. Certains cherchent à quitter ce pays par n'importe quel moyen y compris en se convertissant à d'autres religions. -La contre-révolution se couvrira-t-elle de couleurs religieuses dans le monde arabe après les révoltes ? Il y a un risque, mais il y a aussi une conscience de la part des forces démocratiques dans ce pays de cela. Il y a une résistance de la part de ces forces en Egypte et en Tunisie. Les femmes tunisiennes sont bien organisées. Autant pour les laïcs. Ils essayent de freiner le courant islamiste. Ce courant tente de récolter les fruits de la révolution. La même chose en Egypte. Je crois que les islamistes pensent qu'il est facile de mettre la main sur ces révolutions… -Avez-vous l'impression qu'on a retenu la grande leçon des révoltes arabes en Algérie ? En Algérie, on n'a pas fait de bonnes lectures de ces révolutions arabes. On a sous-estimé un peu ce qui se passe en Tunisie et en Egypte. Avec son histoire avec l'extrémisme, l'Algérie a un avantage. Elle peut faire une lecture plus profonde, dépasser facilement le clivage islamistes/démocrates et aller vers le véritable changement.