Les députés découvrent la surprise «des réformes». Il y a bien «une tromperie sur la marchandise». Le premier projet de texte soumis, hier, à examen au niveau de l'Assemblée populaire nationale (APN) provoque des couacs. Il s'agit du projet de loi électorale. Un texte censé résoudre l'ensemble des lacunes constatées au niveau de l'actuelle loi appliquée depuis 1997. Mécontents, de nombreux députés, représentant diverses formations politiques siégeant à l'Assemblée, crient au scandale à l'intérieur de l'hémicycle et dans les allées de l'institution. Et pour cause, le projet transféré, il y a quelques jours à la commission des affaires juridiques de l'APN, n'est pas celui qui est présenté aux élus pour examen et adoption. Plusieurs articles (une trentaine environ) ont été amendés. Mais pas dans le sens voulu par les députés. D'autres ont été même supprimés. Et c'est la désillusion. En effet, la commission en question a annulé carrément l'article 67 dudit projet qui interdit «le nomadisme politique». «Est déchu de plein droit de son mandat électif, tout élu qui aura rejoint, en cours de mandat, un parti politique autre que celui sous l'égide duquel il a été élu en qualité de membre de l'Assemblée populaire nationale, du Conseil de la nation, d'une Assemblée populaire communale ou de wilaya», lit-on dans l'article contenu dans le projet élaboré par les services du ministère de l'Intérieur et qui est passé à la trappe. Ce geste n'est pas du goût du Parti des travailleurs (PT), dont la porte-parole, Louisa Hanoune, a mené une bataille pour l'introduction d'une telle disposition. «C'est anormal ! C'est un scandale. Nous allons batailler pour réintroduire cette disposition à travers un amendement», lance Ramdhan Tazibt, député du PT. L'article 93 obligeant les ministres souhaitant briguer un mandat parlementaire de démissionner de leur poste au sein du gouvernement, trois mois avant l'élection, suscite aussi la polémique. Si la majorité des partis représentés à l'APN applaudissent cette disposition, le FLN s'y oppose farouchement. Le secrétaire général de l'ex-parti unique, Abdelaziz Belkhadem, aurait même donné instruction à ses députés de faire tomber cet article, ou bien l'amender pour permettre à ses nombreux ministres d'aller défendre les listes FLN lors des prochaines législatives. «Cet article est logique. Les membres du gouvernement ne doivent pas être candidats, tout en gardant leur qualité de ministre, car dans ce cas il n'y a pas d'égalité entre les candidats. Les ministres utilisent les moyens de l'Etat», affirme Mohamed-Séghir Kara, député et membre du mouvement de redressement du FLN. L'autre question qui fait aussi objet de débat est la composante des commissions d'organisation des élections. Certains députés plaident pour la mise en place d'une seule commission qui sera chapeautée par un magistrat. «La mise en place de plusieurs commissions a pour objectif de diluer les responsabilités. Il fallait installer une seule commission, dont la présidence sera confiée à un juge», explique Ramdhan Tazibt. D'autres députés se montrent toujours sceptiques concernant l'indépendance de la justice. «Le problème réside dans l'indépendance de la justice. C'est facile de souligner dans un texte que les juges présideront les commissions d'organisation des élections, mais est-il possible de garantir la neutralité de la justice ?», tonne Ali Brahimi, député de Bouira. Mohamed Hadibi, député d'Ennahdha, abonde dans le même sens : «Le contrôle des élections par la justice est un grand mensonge. Il n'y a dans ce projet qu'un seul article qui évoque la question.» Le ministre de l'Intérieur, Daho Ould Kablia, lui-même, a émis des réserves sur un des articles amendés par la commission juridique. Il s'agit de l'article 83 relatif à l'élection du P/APC, dont la nouvelle formulation contredit, selon lui, les dispositions du nouveau code communal.