Le Conseil des ministres s'est enfin tenu. Le dernier en date remonte au 3 octobre 2005. Après 35 jours de convalescence et après avoir signé la loi de finances de 2006, le 31 décembre 2005, le président de la République a dirigé, hier, les travaux du premier conseil de l'année en cours. Activité attendue dans l'univers politique algérien après la longue absence du chef de l'Etat pour cause de maladie. Pour signifier l'existence d'une certaine volonté de « reprendre les choses en main », Abdelaziz Bouteflika a annoncé la promulgation de textes d'application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, votée par référendum, le 29 septembre 2005. Sans évoquer les raisons du retard ni la date de la promulgation de ces textes, M. Bouteflika a pris le soin de souligner que l'option de la paix a été « souverainement et massivement soutenue par la nation ». Dits quatre mois après le référendum, ces propos suscitent des interrogations. Surtout que bon nombre d'observateurs émettent des doutes quant à l'« applicabilité » de cette charte. Doutes entretenus par les récentes déclarations du chef de l'ex-AIS sur des revendications publiques de crimes et par des attentats sporadiques de type terroriste, perpétrés çà et là, sans qu'ils soient suivis de revendications. Ce n'est donc pas par hasard que M. Bouteflika a, selon les termes du communiqué officiel repris hier par l'APS, insisté, « encore, sur la mobilisation exemplaire attendue du gouvernement et de tous les services de l'Etat » pour la mise en application de la charte. Jusqu'à une date récente, des ministres, interrogés sur les textes d'exécution de cette charte, avaient tous dits que les choses étaient au stade de la « réflexion ». Simple question : M. Bouteflika a-t-il perçu un blocage devant sa démarche pour vouloir le surmonter aujourd'hui ? Hier, le chef de l'Etat n'a pas cessé d'« exiger » du gouvernement de « redoubler d'efforts » dans l'exécution du programme présidentiel « dans toutes ses composantes ». S'agissant du programme quinquennal de soutien à la croissance (doté officiellement de 60 milliards de dollars), le chef de l'Etat a, selon le même communiqué, déclaré qu'il veillera personnellement au respect des échéanciers arrêtés et que chaque ministre sera comptable des résultats de son secteur. « C'est par cela que seront évités les surcoûts et que sera consolidée la crédibilité de l'Etat », a déclaré M. Bouteflika, qui a évoqué « le bon démarrage » du plan de croissance. Intervenant à propos du programme spécial Sud (le premier programme de cette nature adopté du temps du gouvernement Mokdad Sifi n'a jamais fait l'objet de bilan), le président de la République a chargé le gouvernement de veiller pour que ce plan, qui est doté de 377 milliards de dinars, soit exécuté sur la période 2006-2009 (année de la fin du mandat présidentiel actuel), « avec la même célérité et la même souplesse des procédures qui caractérisent désormais la réalisation du programme quinquennal de soutien à la croissance ». « J'entends que les autorisations financières liées à ce programme soient toutes libérées sur les années 2006 et 2007 et que les crédits de paiement ne soient pas une entrave à l'accélération des travaux », a précisé M. Bouteflika. Le Conseil des ministres a décidé d'instaurer le régime dérogatoire des avantages du code des investissements pour les projets dans les PME et l'agriculture à réaliser à travers les dix wilayas du Sud (80% du territoire national). Les wilayas du Sud bénéficient déjà de 300 milliards de dinars inscrits dans le plan de consolidation de la croissance. Les régions des Hauts Plateaux vont être destinataires d'un autre programme spécial devant être adopté avant la fin mars 2006. M. Bouteflika a dit attendre, « dans les plus brefs délais », les détails de ce programme. Le président de la République a appelé la nation à « puiser dans son patriotisme admirable pour se mobiliser au travail, tourner le dos aux sirènes stériles de la démagogie et du populisme et appuyer le processus de réformes incontournables que le pays doit faire avancer ». Savoir où se trouvent « les sirènes stériles de la démagogie » risque d'être un véritable casse-tête pour les fins analystes politiques.