Afin de marquer son retour aux affaires, le président Bouteflika a consacré son premier Conseil des ministres - depuis trois mois - à une « relecture » de son programme politique et économique, manière de signifier que rien n'a changé dans ses choix fondamentaux et qu'il reste toujours maître du jeu. Le chef de l'Etat a ressuscité le dossier de la « réconciliation nationale » qui, depuis le référendum du 29 septembre 2005, a bel et bien été oublié, voire même enterré, en l'absence de textes d'application et surtout de ces fameuses « redditions en masse » de terroristes annoncées dans l'euphorie de la campagne électorale de l'été dernier. Beaucoup avaient cru, naïvement, à ce moment-là, que les maquis allaient se vider dès le lendemain du vote sur la charte et que « la paix des braves » allait définitivement s'installer dans le pays. Le président de la République n'a soufflé mot sur le manque d'impact de la loi sur les groupes terroristes et sur les causes des lenteurs, voire des blocages, se limitant à annoncer une prochaine promulgation des fameux textes d'application. Il s'est abstenu, cette fois-ci, de pointer un doigt accusateur sur des « cercles du pouvoir », ainsi qu'il l'avait fait il y a quelques mois, sans les identifier toutefois, contribuant à semer le doute sur cette question déjà assez confuse dans les esprits. Le chef de l'Etat compte aujourd'hui, par le biais de la législation, faire basculer dans le repentir les groupes terroristes, particulièrement les moins radicaux. Jusque-là, ces derniers ont toujours campé sur leurs positions de rejet, recourant même, ici et là, à des attentats sanglants, le tout dernier ciblant quatre employés du service des eaux près de Aïn Defla, la veille de l'Aïd El Kebir. Une batterie de lois et de décrets les convaincra-t-ils de se rendre ? Ce serait ignorer superbement la dimension idéologique de leur combat, ce pourquoi ils n'hésitent pas, depuis plus de dix ans, à égorger et mutiler leurs compatriotes, n'épargnant ni femmes ni enfants. Le président de la République ne s'est pas hasardé sur ces sables mouvants, certainement pour ne pas être amené à se poser des questions sur sa stratégie d'alliance avec l'intégrisme qui prospère à la faveur de la réconciliation nationale. L'émir Hassan Hattab avait, il y a quelques mois, posé des conditions draconiennes pour se repentir, allant jusqu'à la « réhabilitation » par l'Etat du FIS. D'autres chefs terroristes, parmi eux Madani Mezrag et Ahmed Benaïcha, n'arrêtent pas de glorifier la décennie rouge et de justifier les assassinats passés. Les politiques du parti dissous sont, eux, dans une spirale de surenchère dans le but d'arracher la maximum de concessions, aidés en cela et dans l'ombre par les responsables des partis islamistes au pouvoir ou dans sa périphérie. L'intégrisme conquérant est-il synonyme ou porteur de paix ?