Après avoir été longtemps le principal interlocuteur palestinien des Israéliens et des Occidentaux, Abbas est désormais mal vu par ces derniers après son passage au siège des Nations unies. Ghaza. De notre correspondant Le président Mahmoud Abbas, âgé de 76 ans, est devenu aujourd'hui une personne indésirable pour le gouvernement israélien qui veut le voir disparaître de la scène politique. Non pas qu'il soit subitement devenu partisan de la résistance armée, mais juste parce qu'il a osé réclamer devant le monde, au siège des Nations unies, le droit de son peuple à l'indépendance et à la souveraineté sur les territoires palestiniens occupés en 1967. Comment punir le président de l'Autorité palestinienne ? C'est la question que se posent les dirigeants israéliens de droite, à leur tête le Premier ministre et chef du Likoud, Benyamin Netanyahou, et Avigdor Lieberman, son ministre des Affaires étrangères, qui est aussi le chef du parti d'extrême droite, Israël Beitenou. Faudrait-il le soumettre a un siège militaire, comme son prédécesseur le défunt président Yasser Arafat, tombé en martyr dans des conditions obscures au mois de novembre 2004, après plus de trois ans de cloisonnement dans ses bureaux de la «Moqataa», à Ramallah, en Cisjordanie occupée ? Des déclarations récentes de Lieberman ont été qualifiées par l'Autorité palestinienne de véritables appels à l'élimination physique du président Abbas. Mais ce scénario s'avère finalement difficile à réaliser vu les changements profonds que connaissent les pays arabes, suite aux révolutions populaires. Hamas, un allié objectif d'Israël C'est d'autant plus vrai en Egypte, avec la chute du président Hosni Moubarak et de son régime, qui fermaient l'œil sur les atrocités israéliennes quelle que fût leur gravité. Alors pourquoi ne pas profiter de la division entre le Fatah du président Abbas et le Hamas de Khaled Mechaâl pour lui asséner un coup dont il ne se remettra peut être plus ? Pour certains observateurs, l'accélération de la transaction qui a consista en la libération du soldat israélien, Gilaad Shalit, contre 1027 prisonniers palestiniens, était principalement dirigée contre le président Mahmoud Abbas, dont la popularité a sensiblement augmenté dans les territoires palestiniens, après son discours devant l'Assemblée générale des Nations unies et la demande officielle de l'adhésion de la Palestine comme membre à part entière de cette institution internationale. Un des buts de la transaction réalisée entre le gouvernement israélien et le mouvement Hamas, qui contrôle la bande de Ghaza depuis le mois de juin 2007, est de frapper cette popularité en augmentant celle du mouvement Hamas et de ses dirigeants. La révélation de Yediot Aharonot Le Premier ministre israélien continue, par ailleurs, à exploiter les divisions interpalestiniennes pour mettre en doute la représentativité du président Mahmoud Abbas en tant que président de l'ensemble des Palestiniens et donc en tant que partenaire palestinien crédible dans tout processus de paix avec Israël. Pour Avigdor Lieberman, qu'on peut assimiler à un porte- parole des extrémistes israéliens, l'Etat hébreu préfère parler et négocier avec des Palestiniens nés et ayant grandi en Cisjordanie. C'est ce qu'a révélé le quotidien israélien Yediot Aharonot. Lieberman veut donc choisir les dirigeants palestiniens à sa guise pour être sûr qu'il ne diront jamais non à la politique d'expansion que mène le gouvernement israélien dans les territoires occupés, pour finalement empêcher toute idée de création d'un Etat palestinien digne de ce nom. Dans le cadre de l'élimination politique du président Mahmoud Abbas, mais cette fois sur le plan international, le gouvernement israélien a présenté une motion de protestation officielle au Conseil de sécurité de l'ONU et au secrétaire général, Ban Ki- moon, contre le président de l'Autorité palestinienne pour ce qu'il a qualifié, de «son empreinte», sur les roquettes tirées de la bande de Ghaza contre israël, même si en même temps il reconnaît que le responsable de la sécurité dans l'enclave palestinienne est le mouvement Hamas. La situation est donc très sérieuse, en ce sens que le gouvernement israélien actuel semble prêt à tenter le diable pour éliminer Mahmoud Abbas, en lequel il voit un danger stratégique. D'où la nécessité de soutenir cet homme et de le protéger, par les Palestiniens, en mettant fin à leurs divisions, mais aussi par le monde arabe, qui doit lui procurer les moyens de sa politique.