Alors que des membres de la puissante tribu des Warfallah, sur laquelle a reposé le régime libyen durant quatre décennies, jure de venger Mouammar El Gueddafi, assassiné il y a dix jours à Syrte par les combattants du Conseil national de transition (CNT), le chef de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, est arrivé hier à Tripoli pour une visite surprise, au dernier jour de la mission aérienne de l'Alliance atlantique. M. Rasmussen a rallié Tripoli pour des entretiens avec les nouveaux dirigeants libyens. Il s'agit de la première visite en Libye d'un secrétaire général de l'Otan, organisation qui a joué un rôle déterminant dans le renversement du régime de Mouammar El Gueddafi. «Ce soir à minuit (hier ndlr), l'opération 'Protecteur unifié' prendra fin. Je ne prévois pas un rôle majeur pour l'Otan. Il revient désormais aux Nations unies d'être en première ligne dans l'assistance internationale aux nouvelles autorités libyennes», a-t-il déclaré à la presse dans l'avion qui l'amenait à Tripoli. Autrement dit – et en l'absence notamment d'une stratégie de sortie de crise – Anders Fogh Rasmussen lègue la «patate chaude» que représente le dossier libyen à la communauté internationale. Si les firmes occidentales accourent déjà à Tripoli dans l'espoir de décrocher l'éventuel «contrat du siècle», il incombera à l'avenir, en revanche, aux Nations unies de gérer les dommages collatéraux générés par l'effondrement du régime du colonel El Gueddafi. Bien entendu, le problème devrait retomber en premier lieu sur les voisins immédiats de la Libye. Et même si de nombreux pays, comme l'Algérie, le Niger ou le Mali, n'étaient pas spécialement d'accord quant à la manière dont Mouammar El Gueddafi a été chassé du pouvoir, ils se voient bien obligés aujourd'hui, devant les risques que représente la dissémination dans la nature de l'arsenal d'El Gueddafi, de mobiliser de gros moyens (humains et financiers) pour éviter que ces armes ne tombent pas entre les mains des terroristes et des trafiquants qui activent dans la région du Sahel. Sur le terrain, la situation demeure encore des plus instables, surtout que des combattants du CNT mènent des descentes punitives dans les fiefs ayant soutenu El Gueddafi. C'est d'ailleurs à la suite de ces opérations de «règlements de comptes» que la tribu des Warfallah a songé sérieusement à se lancer dans la résistance. L'ONG Human Rights Watch (HRW) a, à ce propos, fait savoir que des milices de Misrata ont mené dimanche des attaques contre des habitants de la ville de Touarga, un bastion des partisans de Mouammar El Gueddafi durant la guerre civile. Ces milices ont interdit aux 30 000 habitants de la ville, qui ont tous fui, d'y remettre les pieds. HRWs'est basée sur les témoignages de dizaines d'habitants de Touarga déplacés à travers le pays. «Des milices de Misrata terrorisent les habitants déplacés de la ville voisine de Touarga, les accusant d'avoir commis des atrocités avec les forces d'El Gueddafi à Misrata, notamment des viols et des meurtres», a indiqué l'Organisation de défense des droits de l'Homme. L'ONG a également souligné que Touarga a été en partie pillée et incendiée. Devant cet état de fait, HRW a appelé le CNT à placer les différents groupes armés de Misrata sous un même commandement et à juger les responsables des crimes.