La Ligue arabe, jusque-là prudente et patiente dans le lourd dossier syrien, vient de mettre fin à sa mission après l'Aïd sanglant d'une répression aveugle menée par les troupe d'Al Assad. L'opposition syrienne a décidé d'appeler à une protection internationale pour «empêcher le régime de continuer à commettre ses massacres barbares». La Ligue arabe a accusé Damas d'avoir failli à ses engagements concernant le plan de sortie de crise proposé par les pays arabes, le régime de Bachar Al Assad accentuant la répression qui a fait au moins 19 morts dimanche, premier jour de la fête de l'Aïd Al Adha. Le régime syrien avait donné, mercredi, son accord à un plan arabe de sortie de crise prévoyant un arrêt total des violences, la libération des personnes arrêtées dans de la répression, le retrait de l'armée des villes et la libre circulation des observateurs et médias, avant l'ouverture d'un dialogue entre le régime et l'opposition. Mais les opérations sécuritaires ont fait près d'une soixantaine de morts depuis. La Ligue arabe a décidé de tenir une nouvelle réunion sur la Syrie le 12 novembre «en raison de la poursuite de la violence, le gouvernement syrien n'ayant pas respecté ses engagements à appliquer le plan arabe pour une sortie de crise dans le pays», selon un communiqué de la Ligue. Samedi, le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil Al Arabi, avait pourtant appelé le régime Assad à appliquer «immédiatement» son plan prévenant d'une «catastrophe» si les violences continuaient. Les opposants syriens avaient pour leur part rejeté tout dialogue avec le pouvoir à Damas en l'accusant de chercher à «gagner du temps». Mais hier, ils ont tout simplement changé d'approche avec un appel en direction de l'étranger, mais pour une «protection internationale» des civils dans la ville de Homs (centre), pilonnée et assiégée par les forces du régime de Bachar Al Assad et théâtre d'accrochages meurtriers entre soldats et déserteurs présumés. Déclarant Homs «ville sinistrée», le Conseil national syrien (CNS) a demandé à l'ONU, à l'Organisation de la conférence islamique et aux organisations internationales et arabes «d'agir pour arrêter le massacre que le régime commet à Homs en assurant une protection internationale aux civils». Le CNS, qui regroupe la majorité des courants de l'opposition, réclame dans un communiqué «l'envoi immédiat d'observateurs arabes et internationaux à Homs pour qu'ils surveillent la situation sur le terrain et empêchent le régime de continuer à commettre ses massacres barbares». «Nous demandons aux organisations (...) d'appliquer les lois internationales ayant trait à une ville sinistrée», poursuit-il en parlant de Homs, devenue un haut lieu de la contestation du régime. Selon les ONG de défense des droits de l'Homme syriennes, les troupes ont lancé avant l'aube une attaque d'envergure contre les quartiers de Homs, avec des «assassinats» perpétrés par les milices loyales au régime. «Les corps jonchent le sol», selon le CNS. L'armée syrienne qui tente de mater dans le sang la révolte populaire lancée il y a huit mois, a recours à «l'artillerie lourde, aux roquettes et à l'aviation pour bombarder les quartiers résidentiels», a affirmé le CNS. «Le régime encercle Homs pour la cinquième journée consécutive afin de briser la volonté de ses habitants qui ont osé rejeter l'autorité du régime et sa tutelle et qui sont déterminés à revendiquer leur droit légitime à la liberté et à la dignité», ajoute ce Conseil. «Des tirs étaient entendus à Homs où des quartiers ont été pilonnés à la mitrailleuse lourde à l'aube», a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) dans un communiqué, ajoutant que «plus de quarante explosions y ont été entendues». «La plupart des quartiers de Homs sont pilonnés. De violentes explosions étaient entendues dans tous les quartiers, notamment à Baba Amro qui est pilonné depuis cinq jours», ont affirmé les comités locaux de coordination (LCC) qui chapeautent les manifestations sur le terrain, dans un communiqué. Selon l'OSDH, une ONG basée au Royaume-uni, «de violents affrontements nocturnes à l'artillerie lourde ont éclaté entre soldats et déserteurs à Homs faisant des dizaines de morts et de blessés dans les deux camps». Le CNS a appelé la Ligue arabe à «intervenir immédiatement auprès du régime syrien pour qu'il cesse son attaque sauvage contre Homs et autorise l'entrée des produits alimentaires et du matériel médical». Sur le terrain, la mobilisation des militants contre le régime n'a pas faibli, des défilés parfois massifs ont eu lieu dès la prière de l'aube dans de nombreuses villes pour appeler à la chute du régime et soutenir Homs. Les forces armées et de la sécurité sont également intervenues à Zamalka et Irbine, dans la province de Damas. A Damas, elles ont dispersé à coups de gaz lacrymogène et en tirant en l'air une manifestation, à Kafar Soussé, où cinq manifestants ont été blessés et plus de 70 autres personnes arrêtées, dont trente manifestants. D'autre part, les détenus d'opinion ont entamé dimanche une grève de la faim «pour protester contre le régime qui n'a pas tenu ses promesses mensongères de les libérer», selon l'OSDH.