Augustin Fernando Mallo est l'un des meilleurs représentants de la jeune littérature espagnole. La publication du roman Nocilla dream en 2006 l'a rendu célèbre. Ce livre a été perçu par les critiques comme «un tremblement de terre» dans l'univers littéraire ibérique. Nocilla dream a été suivi par Nocilla expérience et Nocilla Lab. De formation scientifique, Augustin Fernando Mallo, 44 ans, est passé à la littérature d'une manière presque spontanée. «Je commence à écrire et ne sais jamais ce qui va passer après», dit-il souvent. Dans son blog (http://blogs.alfaguara.com/fernandezmallo), on peut lire des textes et voir des courbes mathématiques et des schémas géométriques. Ce natif de la Corogne croit à «la post poésie», une nouvelle forme d'expression qui peut allier rigueur scientifique et liberté créative. Le romancier était présent au 16e Salon international du livre d'Alger (SILA) qui a eu lieu en septembre 2011. -De quoi parle la jeune littérature espagnole aujourd'hui ? En Espagne, il y a plusieurs types, plusieurs classes de littérature. Mon écriture est considérée comme une littérature de jeunesse. C'est une littérature qui évoque le monde contemporain. Elle ne se limite pas aux frontières espagnoles, elle est centrée sur plusieurs aspects sociaux, dont la société de consommation... -Dans le sens de la dénonciation… Non pour le principe. Elle l'utilise comme thème d'écriture. Il arrive que la littérature dénonce la société de consommation, mais ce n'est pas le but recherché. Cette littérature récente évoque tant l'élite que les classes populaires. Elles sont mises au même niveau, on leur donne la même importance. -Le thème de l'émigration est-il présent dans cette nouvelle littérature ? Peu. Il y a, cela dit, un genre de littérature qui s'intéresse à la thématique des migrants et des problèmes sociaux. Ce n'est qu'une partie de la production littéraire en Espagne. Il reste qu'en général, et en grande partie, cette question est ignorée, du moins, elle n'est pas abordée de façon directe, elle est évoquée d'une manière allusive. -La littérature espagnole regarde-t-elle vers l'Europe ou vers l'Amérique du Sud ? Elle regarde davantage du côté des Etats-Unis ! Il y a une grande influence de la littérature post-moderne américaine sur la nouvelle littérature espagnole. Par le passé, cette influence était soit française soit latino-américaine. -La guerre civile espagnole est-elle toujours présente dans les écrits littéraires d'Espagne ? Non. Il y a un groupe d'hommes de lettres, dont je fais partie, qui estiment que ce n'est pas un thème d'actualité, un thème du passé. C'est une façon de refuser une espèce de diktat qui a existé jusqu'à un certain temps. Mais, c'est aussi le rejet d'une époque que nous n'avons pas connue. Une époque qui n'intéresse pas la génération d'aujourd'hui. Actuellement, le thème des attentats du 11 septembre 2001 (contre les tours jumelles de New York, ndlr) est évoqué dans la littérature espagnole malgré le fait que cet événement n'a pas eu lieu en Espagne. Même si mon pays a souffert du phénomène, cet intérêt littéraire n'a pas pour vocation de se focaliser sur le terrorisme. C'est simplement une volonté de parler d'un événement qui a été traumatisant pour toute une génération, loin de toute idée politique. -L'époque Franco et l'hégémonie de l'Eglise catholique, pendant une certaine période de l'histoire moderne d'Espagne ont-elles une place dans les romans, nouvelles et poésie ? L'époque du franquisme était une page noire dans l'histoire d'Espagne. Une page tournée. Cette période peut revenir de temps à autre dans les écrits littéraires, mais c'est marginal. Idem pour l'influence de l'Eglise catholique. -Existe-t-il une stigmatisation des Arabes et des musulmans en raison de ce «post-traumatisme» ? En Espagne, cette stigmatisation est absente. Preuve en est l'existence de mosquées dans le pays. Nous accueillons les Arabes -Existe-t-il des lignes rouges dans la littérature espagnole ? Il n'y a aucun tabou. On évoque tous les thèmes. Cela dit, certains auteurs peuvent refuser d'écrire sur des questions précises. -Comment arrivez-vous à concilier science et littérature ? Pour moi, c'est facile. Dans ma tête, science et littérature sont en connexion, indissociables. Le plus difficile précisément serait de les séparer.